« Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture ». Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens tout d'abord à saluer le regroupement de l'ensemble des questions relatives à la mer au sein d'un même portefeuille ministériel. Ce regroupement me semble être un gage de cohérence de l'action publique en ce domaine, et la conduite de ces questions par un « homme de la mer », la traduction d'une ambition réelle du Gouvernement en faveur de l'économie maritime.
Le projet de loi de finances pour 2013 prévoit malgré tout, pour les crédits de l'action 6 consacrée à la gestion durable des pêches et de l'aquaculture au sein du programme 205 de la mission « écologie, développement et aménagement durables », une baisse de 7 % pour les autorisations d'engagement et de 10 % pour les crédits de paiement en regard des crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2012. Cette évolution s'explique par le retour à un budget désormais stabilisé après l'extinction des crédits alloués temporairement au titre du plan pour une pêche durable et responsable – PPDR –, dit plan Barnier. L'importance du secteur économique de la pêche et de l'aquaculture ne se résume évidemment pas à son enveloppe budgétaire de 52 millions d'euros – c'est très peu par rapport à l'enveloppe de l'agriculture, par exemple –, mais découle bien davantage de l'activité de toute une filière, du pêcheur au distributeur et au commerçant en passant par les armateurs, le mareyage, les criées et les transformateurs. Il serait d'ailleurs utile de disposer d'une vision consolidée des efforts publics en faveur de la pêche et de l'aquaculture, recensant les crédits des différentes missions, les aides fiscales ainsi que les crédits européens dont bénéficie le secteur.
Les réformes de la politique commune de la pêche – PCP – et de l'organisation commune de pêche – OCM – constituent la toile de fond de ces crédits en faveur de la pêche. Au-delà de cet exercice budgétaire, c'est l'organisation même de la pêche pour les dix prochaines années qui se décide actuellement au niveau européen. Je tiens d'ailleurs à souligner les évolutions positives qui sont intervenues entre la rédaction du Livre vert et les projets actuels. Ces évolutions sont largement dues à la position ferme et unitaire des responsables français dans ce dossier. L'abandon de l'idée de quotas individuels transférables par navire en est la meilleure illustration. Les crédits alloués au secteur de la pêche et de l'aquaculture répondent aux objectifs de la PCP, soit que les crédits de l'État viennent en contrepartie de l'Union européenne – Fonds européen pour la pêche –, soit que l'Union européenne participe aux dépenses engagées par l'État pour la mise en oeuvre de certains règlements – contrôle des pêches –, soit au cas par cas par le biais de la validation des aides d'État notifiées à la Commission européenne.
Comme chaque année, on constate que trois dispositifs concentrent près de la moitié des crédits nationaux en faveur de la pêche : les plans de sortie de flotte – PSF – pour 7 millions d'euros ; les contrats bleus pour 10 millions ; la participation de l'État aux caisses de chômage pour intempéries et avaries gérées par le Comité national des pêches maritimes et élevages marins – CNPMEM –, pour un montant équivalent à celui des marins pêcheurs cotisants, soit 6,84 millions d'euros, comme en 2012 et en 2011.
Parmi les autres postes budgétaires importants pour la filière, il importe de souligner l'effort consenti en matière de suivi statistique et scientifique ainsi que le soutien aux organismes scientifiques spécialisés. J'appelle toutefois votre attention, monsieur le ministre, sur le risque de pénurie d'ingénieurs halieutes. Leurs travaux ne sont sans doute pas suffisamment valorisés, notamment au sein d'IFREMER, alors que la filière pêche a besoin d'une expertise pointue et réactive pour répondre à certaines assertions des organisations environnementales comme d'ailleurs à celles de la Commission européenne elle-même, hier sur le thon rouge, aujourd'hui sur la pêche en eau profonde.
Je souhaite vous interroger plus précisément sur quatre points.
Le Fonds européen pour la pêche – FEP –, qui a permis au secteur des pêches maritimes de bénéficier d'un important accompagnement financier de l'Union européenne, sera remplacé en 2014 par un nouveau fonds doté de 6,5 milliards d'euros, le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche – FEAMP. Outre que les missions de ce fonds sont élargies aux affaires maritimes et aux accords internationaux de partenariat pour la pêche, plusieurs États se sont déclarés défavorables au maintien des aides à l'ajustement des capacités de la flotte et à la modernisation des navires. Pouvez-vous nous indiquer les initiatives de la France en la matière ?
L'effort financier de l'État en direction des contrats bleus – 10 millions d'euros annuels –, illustre la volonté politique de les pérenniser, tant ces contrats bleus symbolisent l'engagement des adhérents des structures collectives porteuses à pratiquer une pêche responsable et de qualité. La coopérative bretonne Ar Mor Glaz, après l'opposition initiale de la Commission européenne, semble être désormais reconnue pour les prestations halio-environnementales qu'elle assure. En revanche, vous connaissez les difficultés du Fonds pour le développement durable de la pêche – F2DP – à la suite des demandes de remboursements d'aides formulées par l'Europe dans le cadre des contrats bleus. Selon vous, quelles sont les perspectives de parvenir, dans ce dossier, à une issue favorable ?
L'Inspection générale des finances devait rendre le mois dernier un rapport sur l'évolution de la répartition des quotas de pêche. Quels enseignements tirer de ce rapport ? Est-il disponible ?
L'aquaculture marine n'a pas encore l'importance qu'elle pourrait avoir dans notre pays, notamment en raison de nombreux conflits d'usage. Quel est l'état d'avancement des schémas régionaux de développement de l'aquaculture marine créés par l'article 85 de la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche – LMAP – ?
Je terminerai mon intervention en revenant brièvement sur l'association France Filière Pêche, à laquelle je consacrerai un développement plus important dans le rapport. Dans une période économique difficile, je salue la création et l'action de cette association de nature interprofessionnelle qui a vocation à promouvoir les initiatives en faveur d'une pêche durable. Elle regroupe en effet quasiment tous les acteurs de la filière pêche, les producteurs, les acteurs du commerce et de la transformation, ainsi que les distributeurs. Elle bénéficie d'un financement important puisque les enseignes de la grande distribution ont accepté de contribuer à hauteur d'environ 30 millions d'euros par an sur une période de cinq ans, soit annuellement quasiment la moitié du montant de l'ancienne « taxe poisson », dont les pêcheurs ont d'ailleurs regretté de ne pouvoir déceler de retour profitable pour la filière. Lors des récentes auditions que j'ai conduites, j'ai pu mesurer l'espoir des parties prenantes à France Filière Pêche, tout comme le succès rencontré par le lancement récent de la première marque nationale des produits issus de la pêche fraîche française : « Pavillon France ». Grâce à une campagne publicitaire réussie et à un étiquetage spécifique sur les étals de la grande distribution et des poissonniers, c'est à la fois un métier, marin pêcheur, et un produit de qualité, le poisson frais, qui sont valorisés auprès des consommateurs et des restaurateurs.
Les aides aux navires qui s'engagent dans des démarches de réduction de la consommation de gazole ou de plus grande sélectivité des engins de pêche ont également rencontré un franc succès puisque plus de 1 500 bateaux sont concernés, sur les quelque 4 700 que compte la France métropolitaine. D'autres initiatives ont été prises pour soutenir la recherche scientifique dans les domaines des économies d'énergie, de la sélectivité et de l'évaluation des ressources halieutiques. Les interventions du ministère de la mer et de la pêche et celles de France Filière Pêche doivent être complémentaires pour permettre aux marins et aux autres acteurs de la filière de connaître des perspectives d'avenir satisfaisantes.
Pour toutes les raisons évoquées et en raison de la dynamique désormais engagée, je donne un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 205 consacrés à la pêche et à l'aquaculture.