Intervention de Nicolas Bériot

Réunion du 16 avril 2014 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Nicolas Bériot, secrétaire général de l'Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique, ONERC :

La situation de la Chine et des États-Unis n'est pas aussi mauvaise que ce que l'on dit parfois. Aux États-Unis, la conjoncture est relativement favorable car le président actuel est plutôt moteur en matière d'évolution climatique et le pays participe activement à la préparation de la Conférence de Paris.

Quant à la Chine, elle investit chaque année 100 milliards de dollars dans des infrastructures liées à l'énergie, mais les Chinois souhaitent que nous les aidions à orienter leurs investissements dans la bonne direction et nous demandent d'accélérer les transferts de technologie. Il leur est difficile de prendre des engagements en matière de réduction d'émissions de gaz à effets de serre car leur trajectoire de développement est encore loin du pic d'émissions, mais ils sont dans des dispositions favorables, en particulier sur le sujet des villes durables.

En outre, les dirigeants chinois subissent une très forte pression interne due à la pollution de l'air, ce qui plaide en faveur d'un changement de politique énergétique. Depuis 2013, les discours évoluent : le président chinois lui-même a évoqué la notion de « civilisation écologique » et la planification place la croissance au second plan derrière le développement harmonieux.

En ce qui concerne notre association aux travaux européens, l'Union européenne a adopté en mars 2013, après plusieurs années de travaux, une stratégie d'adaptation au changement climatique, sans oublier la DG Climat créée en 2010.

L'Europe a défini plusieurs axes de travail.

Le premier est la mise en commun de connaissances via une plateforme d'échanges, le site Climate-ADAPT, auquel nous contribuons. L'adaptation est une discipline très jeune et nous sommes tous des apprentis en la matière. Le plus important est d'échanger de la connaissance.

Le deuxième axe est l'intégration de l'adaptation dans les politiques publiques.

Le troisième consiste à promouvoir le traitement des questions au niveau transfrontalier afin, par exemple, d'amener les pays partageant un bassin fluvial à coordonner leur action.

Le quatrième axe tend à la mise en place d'outils d'incitation.

L'ONERC est associé à cette démarche. La Direction générale de l'énergie et du climat du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a été désignée point focal français en matière d'adaptation.

Faut-il alourdir la réglementation ? Encore une fois, la discipline est très jeune et des transformations profondes nous attendent. Nous en sommes au stade du développement de nos connaissances. Il nous faut élargir notre regard et améliorer notre compréhension des systèmes que nous mettons en oeuvre et leur dépendance par rapport à l'environnement, aux extrêmes, leur consommation de ressources naturelles, la variabilité climatique actuelle, la saturation de la ressource et la fragilité dans laquelle nous nous trouvons par rapport à toute évolution du climat.

Le moment d'entrer dans le dur de la réglementation n'est pas arrivé mais nous pouvons commencer à prendre en compte l'adaptation en prenant en compte cette question du changement de climat avant toute décision d'investissement, par exemple en demandant à des scientifiques, avant de procéder à toute nouvelle construction, une étude sur son adaptation au changement climatique.

Hervé Le Treut, directeur d'IPSL (Institut Pierre Simon Laplace), membre de l'Académie des Sciences et modélisateur du climat, a animé en région Aquitaine un chantier pour lequel il a demandé à plusieurs dizaines de laboratoires de travailler ensemble. Cette expérience a été extrêmement riche.

En matière de réglementation, il convient de ne pas aller trop vite, faute de quoi nous risquons de prendre des dispositions contraires à l'adaptation. Nous devons plutôt nous projeter et envisager différents scénarios.

Réfléchir sur l'adaptation est une formidable porte d'entrée vers le développement durable et la transition écologique. Je dirai que l'on ressort d'un travail sur l'adaptation plus intelligent qu'avant d'y être entré…

Concernant l'industrie, l'adaptation au changement climatique relève d'une échelle de temps supérieure à celle de la planification des investissements et beaucoup d'entreprises travaillent avec une visibilité de quatre ou cinq ans. Ce sont les entreprises des secteurs de l'énergie ou des transports, qui réalisent des investissements plus importants, qui sont les plus investies dans la question de l'adaptation.

Je voudrais pour terminer vous parler de l'association des Entreprises pour l'environnement (EPE). Depuis près de trois ans, nous entretenons une relation de travail avec ce club de grandes entreprises investies dans les questions environnementales et nous venons de publier un guide intitulé « Les entreprises et l'adaptation au changement climatique » qui a rencontré, lors de sa présentation au début de ce mois, un très grand succès.

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