Intervention de Nicolas Dhuicq

Réunion du 9 avril 2014 à 16h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Dhuicq :

Vos remarques sur la technique concernent tous les domaines de la connaissance humaine – nanotechnologies, interface entre l'homme et la machine, « homme augmenté » avec l'horrible possibilité que prévoient certaines associations américaines de l'émergence de deux humanités. Elles ne sont donc pas spécifiques au nucléaire.

Du fait du stock global disponible de matière fissile, il n'est pas certain que l'Iran réussirait à fabriquer plus que quelques munitions.

Vous n'avez pas soulevé la question, inquiétante pour l'avenir, de la convergence des modes de propulsion et des vecteurs. Ces derniers, qu'ils emploient des armes conventionnelles ou nucléaires, seront bientôt les mêmes, ce qui posera des problèmes de confusion lors de la détection des systèmes.

L'avion F-22 est incomparable, mais le B-2 reste le seul bombardier stratégique capable d'intervenir à tout moment et à tout endroit de la planète ; nous courons le risque de vivre dans un monde où seuls les États-Unis pourront dominer, du fait de l'amélioration technique et de l'augmentation des coûts qu'ils consacrent aux instruments de guerre. La propagande américaine incite toujours les autres puissances à baisser leur garde en matière nucléaire. Je ne pense pas qu'un monde unipolaire serait très sain.

Les dernières guerres conventionnelles se sont avérées des échecs : les talibans reviennent, au moins pour la troisième fois, en Afghanistan ; nos troupes en République centrafricaine se trouvent plus ou moins encerclées et les armes y sont volées, et le délai de reconfiguration de nos munitions conventionnelles est passé de deux mois à un an. Imaginons que les puissances – catégorie à laquelle nous pensons encore appartenir – désarment et perdent leurs explosifs nucléaires, et qu'un pays moyen possède les matières premières dont notre économie a besoin, et qui sont nécessaires pour maintenir niveau de vie et démocratie : que ferons-nous ? Les responsables politiques qui n'ont plus de culture historique et qui, pour certains, vivent dans l'irénisme le plus absolu, enverront-ils des hommes se battre à l'autre bout du monde pour maintenir les voies de communication et l'approvisionnement de leur pays ? Dans notre doctrine, les voies de communication et les matières premières vitales comptent parmi les intérêts stratégiques de la France. Je ne pense pas que nous aurons, à l'avenir, les moyens conventionnels d'assurer la prééminence des sociétés occidentales, ce qui m'inquiète terriblement. Je constate, au contraire, une course à l'armement conventionnel ; les États-Unis, grâce à leur monnaie dont ils inondent la planète, développent des explosifs puissants et précis qui pourront remplacer des armes faisant appel à la technologie de l'atome, comme nous l'a indiqué le général Henri Bentégeat au cours de l'audition de ce matin. Un tel monde ne me paraît pas plus rassurant et il convient, pour la paix, de conserver la dissuasion nucléaire.

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