Intervention de Jacques Rigaudiat

Réunion du 30 avril 2014 à 9h00
Commission des affaires économiques

Jacques Rigaudiat, conseiller maître :

Sur l'empreinte écologique, il existe des études internationale et nationale ; nous nous référons aux chiffres du service statistique du ministère du développement durable (SOeS). La définition de l'empreinte fait l'objet, il est vrai, de discussions méthodologiques et de procédures lourdes.

Mais, pour les émissions nationales de CO2 et de gaz à effet de serre, nous acceptons des chiffres qui s'appuient également sur des règles conventionnelles. Je ne suis pas sûr que les modalités de calcul du potentiel de réchauffement global du protoxyde d'azote qui sont utilisées aujourd'hui seraient approuvées par un physicien. Mais elles ont été négociées et sont acceptées par tous aujourd'hui.

Dans les procédures nationales, il n'y a pas de recensement des émissions de CO2, l'évaluation reste conventionnelle même si elle obéit à des procédures.

Il ne faut pas sous-estimer la complexité actuelle. La mesure de l'empreinte écologique n'est pas plus contraignante que celle des émissions nationales, mais la difficulté tient à l'adoption d'une définition internationale ou européenne. La Conférence de Paris peut être l'occasion d'avancer dans cette voie.

L'empreinte et les émissions en France divergent complètement : la première est évaluée à 12 tonnes d'équivalent CO2 par habitant quand la seconde est de 8 tonnes. Cette différence s'explique par le contenu en carbone du solde du commerce extérieur et l'importation croissante de produits chinois fabriqués à partir d'une énergie très carbonée. Alors que les émissions sont passées de 10 tonnes en 2000 à 8 tonnes en 2011-2012, l'empreinte est passée de 11 à 12 tonnes. Si l'objectif est la lutte contre le réchauffement climatique, on ne peut pas se satisfaire du critère des émissions de gaz à effet de serre.

En matière d'intermittence, vous avez évoqué un rendement de 20 à 22 % pour le photovoltaïque. Le rapport prend en compte le facteur de charge, c'est-a-dire le nombre d'heures de production par rapport à la capacité disponible. Nous parvenons à 11-12 % pour le photovoltaïque et 20 % pour l'éolien. Il ne faut pas confondre la puissance installée avec la production électrique.

En France, 15 % de la production d'électricité sont le fait des énergies renouvelables ; 12 % proviennent de l'hydroélectricité, soit 80 % des énergies renouvelables. Les énergies intermittentes fournissent 3,5 % de la production – 0,7 % pour le photovoltaïque.

Le problème de ces énergies vient de ce que l'électricité produite est injectée de manière décentralisée en moyenne tension sur un réseau de distribution qui n'a pas été conçu pour cela. Le coût des investissements pour adapter les réseaux n'est donc pas seulement lié à la construction de lignes mais aussi à l'installation de stockage rapide.

Les investissements dans les réseaux nécessaires pour respecter l'objectif de 20 % d'énergies renouvelables d'ici à 2020 sont estimés à 5,5 milliards d'euros, dont 4,3 milliards selon ERDF pour la distribution et 1,2 milliard pour les transports selon RTE.

S'agissant de l'hydroélectricité, une très intéressante étude de l'ADEME sur les technologies de stockage montre que les capacités des stations de transfert de l'électricité par pompage (STEP) sont limitées à un terrawatt, ce qui ne correspond pas à l'ampleur des besoins.

Autre difficulté, les STEP comme les combinés charbon-gaz ne sont aujourd'hui pas rentables. C'est le cas en France et en Allemagne. Les technologies ne sont pas en cause. C'est le contexte énergétique mondial, durable selon nous, qui l'explique. Aux Etats-Unis, grâce au développement très rapide des gaz et huiles de schiste, l'économie est décarbonée, les gaz non conventionnels se substituant au charbon. Il en résulte des exportations massives de charbon américain qui font baisser les prix de ce dernier en Europe.

Le développement des énergies renouvelables suppose une solution alternative lors des creux de production : l'Allemagne utilise à cet effet le charbon, voire le lignite. La conséquence en est depuis trois ans une augmentation des émissions de CO2 pour la production d'électricité en valeur absolue et relative.

Le développement des gaz non conventionnels va bouleverser durablement la donne et avoir un effet sur le prix relatif du charbon alors que le marché du carbone, qui se voulait un instrument de régulation, est un échec.

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