M. Alain Vidalies, de retour parmi nous, se souvient certainement de l'échange que nous avions eu dans l'hémicycle au sujet de l'utilisation du véhicule de la proposition de loi pour présenter des textes importants. On nous avait promis un grand projet de loi sur la famille, avec un rapport à la clé pour nourrir les débats du Parlement – ledit rapport a du reste été publié et son auteur a reçu récemment la Légion d'honneur –, mais ce projet, on est en train de nous le vendre à la découpe et le présent texte est apparemment la première traduction de ces grandes intentions familiales.
La première utilité du véhicule de la proposition de loi est de l'exonérer de différents avis qui nous auraient été précieux : le Conseil d'État ne s'est pas prononcé, aucune étude d'impact n'a été réalisée. Je ne remets pas en cause le travail de la rapporteure et de la secrétaire d'État, mais il aurait été intéressant que nos débats soient alimentés par les expertises généralement effectuées dans le cadre de l'étude d'impact. J'aimerais savoir ce que seront les conséquences effectives du texte sur la vie quotidienne. Aujourd'hui encore, je ne le vois pas très bien !
Mais la proposition de loi me semble être dans la ligne de ce que votre Gouvernement défend depuis le début de la législature, madame la secrétaire d'État, à savoir une forme de prépondérance accordée à la permanence des liens sociaux et affectifs par rapport aux liens biologiques, une volonté de faire droit aux liens affectifs et de l'écrire dans la loi, avec tout le formalisme – et, partant, toute la difficulté – que cela suppose. Lorsque l'on cherche à écrire le droit en « collant » de façon trop précise aux situations particulières, il perd de sa puissance ou se complexifie. Nous le verrons lors de l'examen des articles. La notion d'« acte important », à l'article 4, me semble notamment plus susceptible de nourrir des contentieux à répétition que de clarifier quelque situation que ce soit.
Au surplus, la très grande majorité des situations visées par le texte sont déjà réglées par les conventions entre les personnes. Je ne nie pas que des difficultés se posent à telle ou telle occasion, mais nous devons faire très attention à toute modification du code civil en la matière. Beaucoup de familles vivent sous le régime de ces conventions qui organisent le partage ou la délégation de l'autorité parentale et qui sont d'une grande simplicité – les écoles, les centres aérés, les hôpitaux le savent bien. Je doute de l'utilité d'une formalisation de ces questions. On créera probablement davantage de complexité, soit le contraire du but poursuivi.