L'éclatement d'une famille est dramatique à la fois pour le couple et pour les enfants. Cette proposition de loi ne s'intéresse qu'aux effets de l'éclatement, nullement aux causes. La société, donc l'État, est pourtant partie prenante dans les causes de ce phénomène. Alors que les familles éclatent si facilement, en si grand nombre et avec des dégâts de plus en plus importants, il me paraît extraordinaire que l'on se désintéresse des causes.
Ce n'est pas, je le sais, l'objet du texte, mais, à mes yeux, un bon législateur est un législateur modeste et prudent. Lorsqu'il prétend régler tous les problèmes par la loi, bien souvent, il ne fait que les aggraver.
La proposition de loi porte sur trois sujets : l'autorité parentale et son exercice lors des divorces, la promotion d'un nouveau modèle de la famille sociale accordant une place très élargie au tiers éducateur, la promotion de la médiation familiale pour régler les violences lors des divorces. Elle apporte deux thèmes dans le débat législatif : une imposition de fait du statut du beau-parent dans une vision très large et des facilitations pour les couples homosexuels mariés ou non mariés dans la délégation de l'autorité parentale.
Cependant, elle comporte plusieurs failles. Sa partie la plus problématique se situe en son chapitre II, qui veut consacrer « la place croissante prise par le tiers ». L'article 10 pose le grave problème de la parenté distributive. Contrairement à ce que prétend la proposition de loi, cette modification contribuerait à diluer encore plus l'autorité parentale du conjoint séparé. Par ailleurs, le mandat n'est pas assez complexe pour prémunir l'enfant du risque de la multiplication des intervenants, alors même qu'il conviendrait de lui éviter d'autres traumatismes. Enfin, avec la garde prioritairement accordée à la mère, cette disposition travaillera encore plus à la disparition de la figure du père dans notre société. Sans doute y a-t-il des enfants qui attendent leur père derrière la vitre, madame la secrétaire d'État, mais il y a aussi des pères qui ne peuvent exercer leur droit de visite et qui attendent derrière la vitre de leur voiture…
L'article 11 pose l'abandon de la préférence pour la famille biologique. On ne considère plus qu'une parenté sociale afin de continuer à saccager le modèle traditionnel d'éducation des enfants. On comprend également que cette disposition vise à simplifier l'exercice de l'autorité dans les couples homosexuels.
L'article 12 entre en contradiction avec l'article 372-2 du code civil, puisqu'un tiers pourrait effectuer des actes importants pour l'enfant avec la seule autorisation du juge. Par ailleurs, en cas de dispute entre le mandant et le tiers, l'article place les deux intervenants sur un pied d'égalité dans la saisine éventuelle du juge. Il marginalise donc le parent biologique.
L'article 14 donne la possibilité surréaliste de voir un tiers ayant été mandaté pour exercer l'autorité parentale conserver cette autorité alors que les parents voudraient la lui ôter. Par ailleurs, il force le juge à accepter les mandats sans prêter attention à l'intérêt supérieur de l'enfant.
Lors de sa visite au Vatican, Manuel Valls avait promis un apaisement avec les catholiques. Or cette proposition de loi est une nouvelle provocation. Alors que la famille devrait être le lieu de l'héritage, de l'éducation et de la continuité, le texte propose plus d'éclatement et la création d'une parenté distributive coupée de la réalité.
En multipliant les intervenants dans l'éducation des enfants, le groupe socialiste veut continuer à détruire la famille traditionnelle, processus déjà largement engagé avec la loi dite du mariage pour tous. Dans son chapitre Ier, la proposition de loi ne dit rien de la lutte contre l'explosion coûteuse et traumatisante des divorces.
Par ailleurs, le texte ne met jamais en avant l'intérêt supérieur de l'enfant mais plutôt la discussion entre adultes, qui serait la clé de toute solution. Les choses sont beaucoup plus compliquées ! Dans son message pour la paix, Benoît XVI a donné une définition de la famille traditionnelle : « La famille naturelle, en tant que profonde communion de vie et d'amour, fondée sur le mariage entre un homme et une femme, constitue “le lieu premier d'‘humanisation' de la personne et de la société”, le “berceau de la vie et de l'amour”. Aussi, est-ce avec raison que la famille est qualifiée de première société naturelle […] “qui constitue le fondement de la vie des personnes, comme le prototype de tout ordre social”. »
En forçant la société à changer de modèle familial, c'est donc bien vers la guerre et le désordre que les apprentis sorciers veulent nous amener. Imaginons un instant le traumatisme d'enfants qui pourraient avoir une infinité de tiers éducateurs au cours de leur existence !
Par ailleurs, les dispositions sont manifestement oublieuses des réalités humaines. L'article 372-2 du code civil tentait de préserver une place pour chacun des parents biologiques dans l'éducation des enfants. Avec votre texte, la disparition programmée de cette entente, pourtant nécessaire à l'éducation d'un enfant, est amorcée. Pis, on sait bien, au vu des statistiques, que c'est la disparition de la figure du père qui est organisée. Nous allons vers une société sans repères et sans figure paternelle, c'est-à-dire vers une société du chaos.
Ce texte établit la volonté du législateur de détruire l'ordre naturel en le remplaçant par un ordre contre-nature qui déstructure et l'individu et la société.