Les provisions pour déconstruction sont évaluées sur le fondement d'une étude du ministère de l'industrie et du commerce datant de 1991, que l'on a confrontée à l'étude Dampierre de 2009 évaluant le coût de déconstruction d'un site de quatre tranches de 900 mégawatts et à des comparaisons internationales réalisées par un cabinet extérieur. En outre, dans le parc de première génération en cours de déconstruction, il existe à Chooz un réacteur à eau pressurisée (REP) dont la puissance est certes faible – 300 mégawatts contre 900 au minimum dans le parc actuellement exploité –, mais dont le démantèlement, en particulier celui de sa cuve, prévu à échéance de dix-huit mois à deux ans, nous procurera un retour d'expérience utile pour mettre à jour l'étude Dampierre en vue de nous en servir lorsqu'il s'agira de déconstruire les centrales aujourd'hui en fonctionnement.
À ce jour, aucun élément connu ne nous conduit à revoir l'évaluation des provisions arrêtée sur ces bases. Et si, comme l'a relevé la Cour des comptes, nous ne nous sommes pas appuyés pour cela sur l'étude Dampierre, c'est que celle-ci aurait conduit à constituer des provisions légèrement inférieures – de l'ordre de 70 millions d'euros – à celles qui figurent aujourd'hui dans nos comptes. J'ajoute que la direction générale de l'énergie et du climat a lancé un audit sur le coût du démantèlement des centrales à eau pressurisée qui nous fournira d'autres éléments d'information. Enfin, il faut préciser que notre évaluation repose bien sûr aussi sur l'hypothèse selon laquelle nous disposerions d'exutoires, c'est-à-dire d'installations de stockage définitif des déchets, Cigéo ou autres.
Comme je l'ai dit, le taux de rendement de nos actifs dédiés est nettement supérieur au taux d'actualisation. À cet égard, la composition de ce portefeuille se révèle décisive : toutes les analyses montrent que l'investissement diversifié dans les actions et les obligations permet de générer, à longue échéance, un rendement dépassant les 4,8 ou 5 % de ce taux.
Pour nous assurer que la performance de ce portefeuille garantira le passage de la provision actuelle à la couverture des charges futures, nous avons encore accentué, depuis quelques années, sa diversification en nous tournant vers des actifs offrant le meilleur rapport entre rendement et risque : il s'agit notamment des actifs d'infrastructures, très recherchés par tous les grands fonds, français ou internationaux, qui ont comme nous à provisionner à très long terme. L'évolution de la réglementation nous permettant désormais d'investir un quart des fonds dédiés dans cette classe d'actifs, nous avons créé un « sous-portefeuille » EDF Invest, doté de plus de 5 milliards d'euros et géré par une équipe spécifique, auquel nous avons affecté la moitié des titres RTE – soit 2,3 milliards d'euros car nous nous en sommes tenus à la valeur nette comptable au moment de l'opération, par prudence, mais ce montant a augmenté depuis trois ans grâce au niveau élevé du rendement, supérieur au taux d'actualisation. Nous l'avons pu dans la mesure où EDF ne contrôle pas RTE tout en en détenant la totalité. Pourquoi aller chercher ailleurs alors que cette infrastructure est, à mon avis, la plus belle de France ? Mais nous avons également investi dans une autre infrastructure remarquable, Transport et Infrastructures Gaz de France, en constituant à cet effet, l'an dernier, un consortium avec un fonds souverain de Singapour et avec un opérateur industriel italien, la SNaM (Società Nazionale Metanodotti), afin de racheter à Total ces installations de stockage et ce réseau de transport développé à partir de Lacq – nous en détenons aujourd'hui 20 %.
Faut-il loger les actifs dédiés dans un fonds indépendant des opérateurs ? Nous appliquerons bien sûr la loi, mais nous considérons qu'EDF doit être responsable de la totalité de son activité dans le nucléaire, y compris le démantèlement et la gestion du combustible, et qu'elle doit par conséquent se mettre en mesure d'assumer les charges futures qui en découlent, par une bonne gestion des actifs dédiés. C'est en effet le rendement de ce portefeuille qui permettra de compenser l'effet du temps et de faire face au passage de la provision à la couverture des charges. Si, demain, la gestion de ces fonds était externalisée et qu'ils étaient utilisés pour des investissements moins diversifiés, cela ferait courir un risque financier en raison d'un moindre rendement.