Intervention de David Azéma

Réunion du 6 mai 2014 à 16h15
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

David Azéma, directeur général de l'Agence des participations de l'état :

Parce que la rotation du personnel est rapide dans l'administration. Ainsi, mon directeur adjoint était administrateur d'Orange et de Thales lorsqu'il est allé à la direction générale des finances publiques. Bien que je lui aie demandé de le rester, compte tenu de ses deux ou trois ans d'ancienneté dans cette fonction et de sa connaissance de ces entreprises, il a jugé que ses responsabilités en matière fiscale rendraient cela difficile. Je n'aurais pourtant vu aucun inconvénient à ne pas devenir administrateur de Thales à sa place. Ce n'est pas une fonction de prestige que d'être administrateur : on l'assure pour se rendre utile. Nous avons donc des progrès à faire. Notre projet d'ordonnance, s'il est adopté avant le mois de septembre, permettra vraiment d'élargir le vivier des administrateurs présents dans les conseils d'administration pour défendre à la fois les intérêts de la société mais aussi ceux de l'État actionnaire.

S'agissant de l'indépendance des administrateurs, il n'existe pas de solution idéale. La plupart des sociétés cotées en bourse ne sont pas contrôlées : elles n'ont pas d'actionnaire de contrôle mais une pluralité de petits actionnaires qui achètent et vendent leurs parts. Si l'on voulait n'avoir au conseil que des représentants de ces actionnaires, on n'y trouverait personne, car la plupart des investisseurs professionnels et institutionnels ne souhaitent pas en faire partie, afin d'être complètement libres de leurs mouvements. Le conseil d'administration d'une société, comme d'une association d'ailleurs, est un collectif d'individus qui, avec leurs qualités et leurs défauts, s'efforcent de prendre les meilleures décisions pour leur entreprise. Ce qui est nouveau aujourd'hui, c'est l'introduction en France du souci anglo-saxon d'une gouvernance assurée par des administrateurs véritablement indépendants. Au fil du temps, en effet, cette indépendance a été faussée, soit que les administrateurs aient occupé leur fonction pendant trente ans, soit qu'ils aient été fournisseurs de l'entreprise. Or, les administrateurs représentent la collectivité des actionnaires, ils ne doivent pas être biaisés dans leurs jugements. D'où cette notion d'administrateur indépendant, dont la réalité est d'ailleurs vérifiée chaque année en conseil.

En matière de gouvernance, nos exigences, dont certaines sont fixées par le code AFEP-MEDEF et d'autres par les directives relatives à l'appel public à l'épargne, imposent désormais la présence d'un certain nombre d'administrateurs indépendants dans plusieurs comités, voire à leur présidence, de telle manière que l'on ne puisse pas déceler l'influence de tel ou tel actionnaire ou organe dirigeant dans la décision prise collectivement et collégialement par le conseil. On ne peut donc assurer la gouvernance sans recourir à des administrateurs indépendants. Il est vrai que, dans les sociétés contrôlées, comme le sont beaucoup des entreprises de mon portefeuille, il faudrait que les actionnaires nomment une majorité d'administrateurs de l'actionnaire. Or, et c'est là une particularité de la loi sur les délégations de service public, lorsque l'État est l'actionnaire majoritaire d'une société, il est minoritaire au sein de son conseil d'administration. En effet, à 49 % de parts, l'État détient presque la majorité des administrateurs, mais à 51 %, il n'en détient plus qu'un tiers.

Il arrive que l'État, sous une autre casquette, ait des intérêts ne correspondant pas forcément à ceux de l'entreprise. La présence d'administrateurs indépendants au conseil permet alors que les intérêts de la société – qu'il s'agisse de ses investissements futurs, de son développement ou de son personnel – soient pris en compte dans la décision de l'actionnaire. Le mélange d'administrateurs représentant les actionnaires au conseil, d'administrateurs indépendants et de salariés forme donc un collectif qui fonctionne bien. Les conseils dans lesquels j'ai la chance de siéger sont plutôt de bonne tenue et la présence d'indépendants n'y est pas une faiblesse. En pratique, je ne pense d'ailleurs pas que M. Emmanuelli se plaigne de la présence de quelques indépendants minoritaires au sein du conseil des différents étages de la BPI.

En ce qui concerne la SNCM, j'ai effectivement reçu, aux différentes étapes de traitement du dossier, des consignes sur la position que les administrateurs devaient adopter au nom de l'État dans le conseil d'administration de la Compagnie générale maritime et financière ou dans celui de la SNCM. Ces instructions concernaient aussi des prêts d'actionnaires à accorder. Sur ce sujet dont vous avez mesuré la forte sensibilité politique, il ne s'agissait donc pas d'une consigne générale sur laquelle fonder nos propres décisions, mais d'instructions au cas par cas, données après arbitrage du Gouvernement.

Il est souvent difficile d'affirmer qu'une participation n'a plus d'utilité ; je suis plutôt partisan de considérer qu'un niveau donné de participation est superflu par rapport à l'objectif poursuivi. Je ne connais guère de sociétés dans lesquelles nous n'aurions vraiment rien à faire ; en revanche, j'ai parfois des doutes sur la pertinence du niveau de notre participation. Par ailleurs, certaines sociétés sont en pré-liquidation parce que leur objet a disparu et qu'elles ne sont plus que des structures de défaisance. Cela est encore arrivé récemment à l'Entreprise minière et chimique.

J'ai déjà évoqué notre politique de dividendes. Encore une fois, nous essayons de ne pas opposer dividendes et développement de l'entreprise, car il n'est pas dans l'intérêt d'un actionnaire de long terme de « couper les pattes » de son entreprise.

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