Intervention de Denis Baupin

Réunion du 6 mai 2014 à 17h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDenis Baupin :

Je voudrais d'abord, au nom du groupe écologiste, saluer le travail de la CNDP. Nous nous félicitons que ce débat se soit tenu. J'ai regretté à de nombreuses reprises les incidents qui ont eu lieu ; vous avez vous-même rappelé le rôle que nos élus ont voulu tenir, quel que puisse être leur avis sur le projet, pour que le débat puisse se dérouler.

Je salue également la conférence de citoyens. J'en ai moi-même organisé une, en tant qu'adjoint au maire de Paris, sur les antennes relais ; une autre avait été organisée par l'OPECST sur les organismes génétiquement modifiés (OGM). Il est toujours intéressant de permettre à des citoyens qui ne maîtrisent pas ces questions complexes d'entendre différents points de vue et d'émettre des préconisations qui éclaireront utilement les décideurs. A la suite du débat public, l'ANDRA a fait connaître ce matin même ses propositions. De fait, elle reconnaît que son projet n'est pas mûr, puisqu'elle explique qu'il lui faudra encore cinq à dix ans de recherches pour pouvoir en présenter un. Au moins le débat public aura-t-il permis de le mettre en évidence.

Je rejoins notre collègue Luc Chatel pour dénoncer l'irresponsabilité de ceux qui ont lancé le programme nucléaire sans proposer la moindre solution pour les déchets radioactifs. Aujourd'hui, cette solution n'existe toujours pas. On nous propose de creuser un grand trou pour enfouir les déchets le plus loin possible ; mais nous ne connaissons pas le coût de ce projet. EDF et l'ANDRA ont parlé de 16 milliards d'euros, la Cour des comptes de 35 milliards. En tant que rapporteur de la commission d'enquête relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire, je peux dire que nous n'avons toujours pas de réponse sur le coût du stockage des déchets. Nous auditionnons l'ANDRA demain, mais je ne suis pas certain que nous en saurons plus sur le coût de Cigéo.

Les questions de sûreté sont pour le moins problématiques. L'ASN nous a dit clairement qu'aucun projet ne lui avait été soumis pour l'instant. Or il s'agit tout de même de créer – pour un siècle – deux installations nucléaires de base (INB), l'une à 1 500 mètres de profondeur et l'autre en surface, cela pour une très grande quantité de déchets radioactifs. Je rappelle que le hangar prévu en surface mesurera 300 mètres sur 300, et que sa hauteur devrait atteindre 30 mètres ! Des centaines de transports devront avoir lieu, dont les riverains ignorent encore s'ils se feront par la route ou par le rail.

Quant aux risques d'incendie, la CNE a reconnu devant l'OPECST qu'il serait préférable de ne pas mélanger certains types de déchets avec d'autres, car, en cas d'incendie, une fumée noire sortirait du site et pourrait faire peur aux riverains !

Enfin, on ignore quels déchets seront stockés. Si l'ASN souhaite un inventaire de ce qui sera enfoui, c'est bien parce qu'elle estime que tout n'est pas clair à cet égard. La réponse dépend évidemment des décisions qui doivent être prises dans le cadre de la transition énergétique, notamment sur la poursuite – ou non – du retraitement des déchets.

Au vu du débat public et de ce que vient de dire l'ANDRA, il est urgent de poursuivre les recherches, c'est-à-dire d'utiliser le laboratoire de Bure, sans renoncer aux autres pistes envisagées à l'origine – notamment, dans le cadre de la loi « Bataille » – pour traiter le problème des déchets radioactifs. Si l'enfouissement en grande profondeur n'est pas validé, il nous faut un « plan B ». D'autres hypothèses avaient été envisagées, notamment le stockage en subsurface. Tant qu'à prévoir une période pilote pour l'enfouissement, prévoyons-en aussi une pour le stockage en subsurface, afin d'être réellement éclairés au moment où nous aurons à prendre la décision.

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