Intervention de Reza Lahidji

Réunion du 17 avril 2014 à 9h00
Commission d'enquête relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire, à la durée d'exploitation des réacteurs et à divers aspects économiques et financiers de la production et de la commercialisation de l'électricité nucléaire

Reza Lahidji, directeur de recherche à l'Institut de droit international :

Oui, et le cas de Fukushima montre l'incertitude de ce type d'exercice.

En parlant de probabilité de 10-4, 10-5, 10-6 par année.réacteur, il est entendu que l'événement « accident dans un réacteur » est indépendant de ce qui se passe dans les autres réacteurs. Ces calculs ne prennent pas en compte un effet « centrale », un effet « site ».

Avant l'accident de Fukushima, les probabilités communiquées par les autorités japonaises étaient de 10-6 pour un accident avec des rejets importants, soit un ordre de grandeur inférieur à ce qu'il est en France. Les réacteurs japonais sont en effet extrêmement solides, et ces chiffrages ne faisaient pas l'objet de contestations. Sur la base de ces probabilités, l'événement fusion du coeur avec rejets importants dans trois réacteurs donne une probabilité de 10-18.

Cependant, le déroulement de l'accident était en partie connu. Une partie de la communauté des sismologues avait indiqué que les hypothèses sismiques sur lesquelles était fondée l'évaluation du risque n'étaient pas les bonnes, en particulier en matière de tsunami, et que la récurrence d'un méga tsunami était à peu près de mille ans dans la région de Sendai. Bien avant la catastrophe, des travaux universitaires et des publications avaient tenté d'alerter sur ce problème. On se retrouve donc avec une probabilité d'un événement face auquel la centrale était totalement démunie, car la probabilité d'une catastrophe conditionnée à la survenue d'un méga tsunami est de l'ordre de 1 et que la probabilité d'occurrence du méga tsunami était de l'ordre de 10-3, probablement plus sachant que la dernière occurrence connue remontait à peu près à mille ans. In fine, on a une probabilité de 10-18 d'un côté, et une probabilité certainement supérieure à 10-3, de l'autre.

Ainsi, ce genre d'exercice comporte des risques. Il faut s'intéresser aux limites et aux incertitudes de l'évaluation de façon très précise – ce que n'ont pas fait les Japonais à l'époque.

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