Au-delà du chiffre lui-même, c'est à un changement de philosophie que nous invite ce débat.
La probabilité est une mesure de notre incertitude. La question est de savoir si l'on veut mesurer cette incertitude ou pas. La méthode sur laquelle s'est toujours appuyé le secteur nucléaire consiste à exclure cette incertitude, en prenant toutes les précautions qui semblent s'imposer pour nous prémunir contre tous les événements qui semblent réalistes et, une fois construite une défense à toute épreuve pour l'ensemble de ces catégories d'événements, en ne se préoccupant pas des événements résiduels. C'est cette méthode déterministe qui continue à orienter la doctrine de sûreté française.
Chercher à chiffrer ces événements résiduels, à leur donner une probabilité, revient bien à changer de philosophie. Or un certain malaise s'exprime à propos de ces événements, car ce chiffre de 10-5 est jugé très incertain. S'il s'agit d'une mesure effective de notre incertitude, on peut tenir le genre de raisonnement que vous faites ; sinon, il faut mettre ce type d'analyse sur la place publique pour corriger ses éventuelles faiblesses – approche certainement la plus fructueuse. Autrement dit, en considérant que 10-5 n'est pas l'exacte probabilité, mais que des précautions ont été prises pour son évaluation, on peut estimer arriver à des probabilités plus faibles.