La probabilité, je le répète, est faible mais non nulle ; d'où la nécessité d'un scénario physiquement réaliste, qui permette d'évaluer les coûts a priori.
Nous nous sommes efforcés d'identifier les composantes du coût. Les composantes radiologiques, autrement dit imputables à la présence de radioactivité, étaient déjà connues des industriels : évacuation des populations, éventuels dommages sanitaires si celle-ci n'est pas assez rapide ou pertes de productions agricoles. Mais, l'exemple de Fukushima le montre, il faut ajouter d'autres composantes non prises en compte par les acteurs du nucléaire à travers le monde, États-Unis en tête, depuis une quarantaine d'années. Ce sont d'abord les coûts liés, pour l'exploitant, au démantèlement du réacteur accidenté et à la remise en état du site ; ce sont ensuite les coûts élevés du remplacement de la source d'énergie électrique, car un accident, même de faible ampleur, entraînerait l'arrêt de la production des réacteurs du même type, et ce dans l'urgence : au Japon, cette mesure de précaution a d'ailleurs fait monter le prix du gaz au niveau mondial. Ce sont enfin les coûts d'« image » générés par l'aversion des acteurs économiques aux risques radiologiques, ce dont pâtirait l'attractivité de tous les territoires, et pas seulement de ceux qui ont été contaminés. Au Japon, des produits en provenance de zones très éloignées de Fukushima sont ainsi devenus invendables. Grâce à l'IRSN, l'Union européenne est revenue sur son intention d'interdire l'accès au port de Yokohama des bateaux battant pavillon européen – je vous laisse imaginer quelles eussent été les conséquences d'une telle décision pour le commerce japonais. Il faut donc tenir compte de l'impact d'un accident sur des secteurs tels que l'agriculture, le tourisme, voire l'industrie.
Selon nos estimations, dans un pays comme la France, ces différentes composantes peuvent représenter jusqu'à 50 % du coût total ; d'où les chiffres que vous avez cités, monsieur le président.