Intervention de Fabien Choné

Réunion du 30 avril 2014 à 15h00
Commission d'enquête relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire, à la durée d'exploitation des réacteurs et à divers aspects économiques et financiers de la production et de la commercialisation de l'électricité nucléaire

Fabien Choné, président de l'Association nationale des opérateurs détaillants en énergie, ANODE :

Plus d'un million, ce qui peut, il est vrai, sembler peu par rapport au nombre total de consommateurs.

L'ANODE a été créée pour prendre part aux réflexions menées en 2006 sur la manière de prendre en compte la spécificité de l'énergie nucléaire dans un marché libéralisé. Ces réflexions avaient abouti au vote de la loi relative au secteur de l'énergie, qui a mis en place le tarif réglementé et transitoire d'ajustement au marché (TaRTAM), que l'ARENH, institué par la loi NOME (nouvelle organisation de l'énergie), a finalement remplacé. D'abord créée pour les détaillants en électricité, l'ANODE s'est ensuite élargie au marché du gaz.

Cette association a pour objet de promouvoir la création d'un marché libéralisé permettant aux consommateurs de bénéficier des avantages offerts à la fois par le développement de la concurrence et par les spécificités de la politique énergétique française. Nous pensons qu'il est tout à fait possible de conserver un monopole de la production d'énergie nucléaire tout en développant une concurrence efficace, non seulement dans les autres formes de production, mais aussi dans l'activité de fourniture d'électricité.

Je précise que l'ANODE n'a pas vocation à prendre position pour ou contre le nucléaire. Le recours à cette énergie relève d'un choix national de politique énergétique, et c'est dans le respect de ce choix que nous souhaitons pouvoir développer la concurrence.

Comme vous l'avez souligné, monsieur le président, nous ne sommes pas opérateurs dans la production d'énergie nucléaire, ni en France ni à l'étranger. Nous ne pouvons donc vous apporter aucun élément d'information additionnel sur le coût de la filière. Toutefois, l'intitulé de la commission d'enquête mentionne les « divers aspects économiques et financiers » de la « commercialisation de l'électricité nucléaire » : c'est sur ce sujet précis que nous avons souhaité participer à vos travaux.

En ce qui concerne l'organisation du marché, il convient de distinguer clairement la production et la fourniture d'électricité. Même si l'une est en aval de l'autre, ces deux activités sont très différentes et subissent des contraintes spécifiques. Aucune bonne raison ne justifierait que les difficultés que pourrait connaître une de ces activités entravent le développement de la concurrence dans l'autre. En clair, l'existence, en France, d'un monopole sur la production d'électricité nucléaire – que nous n'avons d'ailleurs jamais cherché à remettre en cause – ne doit pas empêcher le jeu d'une concurrence effective et efficace s'agissant de sa fourniture.

À cet égard, nous ne comprenons pas la position d'Alain Bazot, le président de l'UFC-Que Choisir, qui estime nécessaire de faire jouer la concurrence sur le marché de la fourniture de gaz, mais pas sur celui de la fourniture d'électricité, sous prétexte que la production fait l'objet d'un monopole. Nous sommes concurrents d'EDF en tant qu'entreprise commercialisant de l'électricité, pas en tant que producteur – et pour cause : c'est impossible.

À y regarder de plus près, les difficultés d'organisation que connaît le secteur sont toutes liées à l'activité de production, qu'il s'agisse de la sécurité de l'approvisionnement, du mécanisme de capacité, de la spécificité de l'électricité d'origine nucléaire, qui représente 75 % de la production. Comment organiser la concurrence quand un seul opérateur concentre les trois quarts de la production – et même plutôt 90 %, car il dispose de moyens de production autres que les centrales nucléaires ?

En dépit de ces difficultés, qui ne sont pas insurmontables et qui, en tout cas, ne concernent pas le marché de la commercialisation, nous pensons que la concurrence peut se développer. Le monopole de la production nucléaire ne fait pas obstacle à la libéralisation du marché de la fourniture de l'électricité. C'est même dans ce domaine que les consommateurs auront le plus à gagner.

Remarquons que la libéralisation a eu lieu en deux temps : la production a été ouverte à la concurrence dès 1999, tandis que la fourniture l'a été progressivement jusqu'en 2007. L'organisation du marché étant désormais réalisée, le développement de la concurrence dans l'activité de commercialisation de l'électricité peut être une source d'avantages pour le consommateur, et ce, sans aucun risque pour lui : aucun changement de compteur n'est nécessaire et, grâce à la réversibilité, il ne court même pas un risque économique.

Je ne parle pas seulement de modération tarifaire, même si la concurrence nous semble le meilleur moyen de maîtriser les coûts, qui connaissent, en effet, une tendance à la hausse. Vous avez noté, monsieur le président, la forte augmentation des coûts de commercialisation d'EDF. Or, si ma mémoire est bonne, le rapport de la Commission de régulation de l'énergie évalue à seulement 15 % la part de cette augmentation, qui est liée au développement des systèmes d'information rendus nécessaires par l'ouverture à la concurrence. La plus grande partie de la hausse n'a donc rien à voir avec cette dernière. Au contraire, la concurrence a incité les dirigeants d'EDF à mettre en oeuvre des plans d'économies susceptibles de réduire les coûts.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion