Intervention de Nicolas Boccard

Réunion du 30 avril 2014 à 10h00
Commission d'enquête relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire, à la durée d'exploitation des réacteurs et à divers aspects économiques et financiers de la production et de la commercialisation de l'électricité nucléaire

Nicolas Boccard, professeur associé d'économie, université de Gérone, Espagne :

Mes travaux sur l'éolien n'incluaient pas les investissements supplémentaires dans les capacités de transport pour profiter des différences de rythme de production entre les pays, ou dans des batteries ou autres systèmes de stockage. J'y insiste, la capacité de transport est peu coûteuse au regard de l'énergie transportée. Le problème est d'arriver à la construire. On aura mis soixante ans à réaliser la deuxième ligne entre la France et l'Espagne. Les Allemands s'aperçoivent, eux aussi, qu'il n'est pas si facile de mener de tels projets. La question se pose dans tous les pays du monde. La fameuse crise de 2001 en Californie est uniquement due aux lois restrictives qui ont interdit aux opérateurs de construire des lignes dans les années 1980. Le couloir existant était congestionné en permanence, ce dont Enron a d'ailleurs profité. On s'accorde désormais à considérer qu'il faut augmenter les capacités, mais les populations voient les choses d'un autre oeil. Le choix est difficile : soit on rapproche les moyens de production des consommateurs, soit on construit des lignes. Il concerne aussi les énergies renouvelables : de véritables usines existent en mer du Nord et en Écosse, demain au Sahara, loin des centres de consommation. Le coût pour acheminer cette électricité n'est pas économique, il est social. Il faut convaincre les gens d'accepter les lignes, ce qui est très difficile à chiffrer.

Contrairement à ce qu'on m'a reproché, je n'ai pas inventé le coût de l'assurance accidents. Je vous invite d'ailleurs à entendre M. Christian Gollier, qui est le spécialiste en France des questions de risque et d'intertemporalité. Comme vous l'a dit le professeur Pierre Picard, la probabilité de survenue d'un accident est réduite – si bien que la couverture est peu coûteuse –, mais l'accident en lui-même est gigantesque. Le traitement mathématique de la question est très difficile et les opinions divergent. Je me suis contenté de retenir le chiffre qui apparaît comme la limite supérieure de prix pouvant être demandé par un groupement de réassureurs pour assurer un pays contre un dommage d'une valeur de 100 milliards d'euros. Ce montant, qui correspond aux dégâts provoqués par l'ouragan Katrina en 2005, est inférieur au coût du tremblement de terre au Japon en 2011, mais très supérieur aux estimations du coût de Fukushima – autour de 40 milliards de dollars, d'après ce qu'on peut lire dans la presse.

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