Je ne répéterai pas les propos du représentant de la CFE-CGC, car nous partageons l'essentiel de ses analyses.
Nous avons réfléchi à la politique des « Quatre E » : économie, énergie, emploi, écologie. Notre pays doit aujourd'hui prendre des décisions. Nous ne sommes pas opposés par principe à une réduction de la part du nucléaire, mais il faut être réaliste et s'interroger sur le calendrier. Est-il possible de prolonger la durée de vie des centrales ? Comment remplacer l'énergie nucléaire ?
La création d'emplois doit être une priorité : pour cela, il faut créer ou maintenir des filières industrielles capables d'exporter. La filière nucléaire est l'une d'elles. On ne réindustrialisera pas le pays sans une énergie bon marché. Or le nucléaire est une énergie bon marché, abondante, récurrente, et qui permet d'assurer l'indépendance de notre pays – à peu près la seule, si l'on refuse de développer les gaz de schiste.
Si l'écologie est une priorité, si nous voulons nous montrer responsables vis-à-vis des générations futures, alors il faut recourir à une énergie qui émette aussi peu de CO2 que possible : là encore, le nucléaire, qui n'en émet pas, est indispensable à l'équation.
La sûreté des installations, à laquelle nous sommes très attachés, a un coût. Mais on peut atteindre un même niveau de sûreté sans copier pour toutes les centrales existantes ce qui se fait aujourd'hui pour l'EPR – ce serait absolument irréaliste. L'ASN, organisme indépendant, vient de préciser que, à Fessenheim comme à Cattenom, la sûreté était bonne. Au passage, je note que nous nous interrogeons beaucoup sur l'EPR, alors que les Chinois ou les Anglais veulent construire de nouveaux réacteurs EPR…
L'énergie hydraulique, qui n'émet pas non plus de CO2, a été évoquée. Notre parc hydraulique est essentiel à la continuité de fonctionnement de la filière nucléaire, en permettant notamment d'assurer le refroidissement des centrales. On ne peut donc pas gérer l'avenir des concessions hydrauliques sans réfléchir aux conséquences possibles de nos actions pour le parc nucléaire.
L'avenir d'Alstom, qui est aujourd'hui en cause, est au coeur de ces questions. Le Comité stratégique de la filière nucléaire (CSFN) a mené une réflexion sur la construction d'une filière globale française, un « pack France all-inclusive » : Alstom en faisait partie, car il fabrique les turbines. Aujourd'hui, avec EDF, AREVA, mais aussi avec des entreprises de taille moyenne comme Assystem, et donc avec Alstom, nous pouvons vendre toute la gamme, de l'amont à l'aval. Ce sont là des emplois qui ne sont pas faciles à délocaliser. Il faut donc bien réfléchir : pour exporter, il est nécessaire d'affirmer sa confiance dans le produit que l'on veut vendre. Le meilleur vendeur du monde ne pourrait pas vendre un outil que nous-mêmes voulons détruire !
Enfin, il faut évidemment réfléchir à un mix énergétique qui réponde à nos propres préoccupations, mais il faut aussi regarder ce qui se fait à l'étranger ; or, aujourd'hui, même après Fukushima, beaucoup de pays parient sur le nucléaire, notamment le Royaume-Uni, la Russie, les pays du Moyen-Orient, le Japon même…
Nous disposons donc d'une filière qui fonctionne bien, qui crée et qui maintient des emplois techniques et à haute valeur ajoutée. Il serait dommage de l'oublier.