Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, madame, messieurs les rapporteurs pour avis, chers collègues, c’est effectivement la première fois qu’un projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire est présenté par un gouvernement, qui reconnaît ainsi toute la place de cette économie dans la vitalité de notre société.
En ce qui la concerne, la commission des affaires étrangères a estimé que la dimension internationale et européenne de ce texte méritait d’être renforcée car, non seulement les ONG sont une composante très importante de l’économie sociale et solidaire, mais les mutuelles et les coopératives sont aussi des outils très efficaces pour permettre un développement mondial équitable et promouvoir la solidarité internationale.
Par ailleurs, l’économie sociale et solidaire est de plus en plus partie prenante de la construction du droit européen et doit donc s’organiser et se structurer encore plus fortement à cette échelle.
À l’occasion de l’examen du texte sur le développement et la solidarité internationale, notre commission avait souhaité que l’économie sociale et solidaire se développe sur le plan international. En effet, au-delà des aides au développement, il existe une forte demande des pays pauvres et des pays en développement en faveur de la construction de nouveaux partenariats économiques. Dans ce cadre, la dynamique coopérative et entrepreneuriale de l’économie sociale et solidaire constitue un outil très pertinent. Je suis convaincu de l’utilité majeure qu’il peut y avoir à associer, dans la même entreprise d’économie sociale et solidaire, des acteurs d’horizons différents : ceux du sud et ceux du nord.
À cet égard, je veux souligner l’intérêt de la formule des sociétés coopératives d’intérêt collectif – les SCIC –, qui permet d’associer des acteurs de nature très diverse, notamment des collectivités territoriales. De fait, 4 800 collectivités territoriales françaises mènent des actions de développement à l’étranger par le biais de 12 500 projets dans 141 pays. C’est pourquoi je propose d’ouvrir le champ des sociétés coopératives d’intérêt collectif au service des actions de développement et de solidarité internationale.
Pour sa part, le Sénat, qui a déjà voté ce texte, a introduit l’article 50 bis sur le commerce équitable. Celui-ci connaît un développement rapide : son chiffre d’affaires en France est évalué à plus de 400 millions d’euros, en croissance de plus de 10 % en 2012. À titre d’exemple, le tourisme peut constituer une forme de commerce équitable qui mérite d’être développé et encouragé. Un plan d’action national en faveur du commerce équitable a d’ailleurs été présenté en avril 2013.
Nous proposerons, avec le rapporteur pour avis de la commission du développement durable, une définition du commerce équitable permettant de compléter le texte.
L’économie sociale et solidaire est inégalement présente dans les États membres de l’Union européenne, mais elle compte de manière significative dans un grand nombre d’entre eux. Un rapport du Comité économique et social européen met en lumière la diversité des formes que prend l’économie sociale et solidaire en Europe, ainsi que le degré très variable de reconnaissance dont elle bénéficie.
Il se pose souvent un problème de définition : plusieurs grandes approches coexistent, source de clivages, selon que l’on prend en compte principalement, voire exclusivement, les finalités sociales, ou bien l’absence de but lucratif, ou encore le mode de gouvernance démocratique des structures.
La Commission européenne a choisi de s’intéresser prioritairement à « l’entreprise sociale » en présentant en 2011 une initiative pour l’entrepreneuriat social. Dans sa définition de l’entreprise sociale, la Commission se concentre essentiellement sur la finalité sociale de l’entreprise. Une telle définition de l’économie sociale et solidaire présente à nos yeux le danger d’en occulter certains critères essentiels, en particulier la gouvernance démocratique, la répartition des bénéfices et l’indépendance des initiatives. Il convient donc que nous soyons très vigilants.
Par ailleurs, le terme d’innovation sociale est de plus en plus utilisé à l’échelle française mais également européenne, sans que son contenu soit précisé. Aussi nous apparaît-il très important que le projet de loi en discussion contribue à clarifier cette notion et à lui donner une impulsion nouvelle. Alors que les mutations technologiques et économiques heurtent fortement nos concitoyens et nombre de nos territoires, l’innovation sociale apporte une contribution déterminante.
Enfin, le droit européen de la concurrence impacte les relations financières entre les collectivités publiques et les acteurs de l’ESS ; ceux-ci attendent de l’Europe l’élaboration de statuts européens leur permettant de développer leur présence dans l’ensemble des pays de l’Union.
Aussi est-il essentiel d’affirmer, comme nous le faisons, la dimension européenne de la composition du conseil supérieur de l’ESS, afin qu’il puisse jouer un rôle d’articulation entre les dimensions nationale et européenne.
Pour toutes ces raisons, la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale souhaite que le Gouvernement et tous les acteurs représentatifs jouent pleinement – et de manière accrue – leur rôle dans le cadre des instances européennes et internationales pour valoriser l’économie sociale et solidaire, telle que nous la mettons en oeuvre en France.