Madame la présidente, monsieur le président de la commission des affaires économiques, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission des lois s’est saisie pour avis de trente et un articles du projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire, adopté par le Sénat le 7 novembre dernier. Ces articles abordent les grands principes de l’économie sociale et solidaire, la transmission des entreprises à leurs salariés et le droit des coopératives et des associations.
Il était temps, mes chers collègues, que le Parlement légifère pour permettre un changement d’échelle de l’économie sociale et solidaire – c’est un député du département natal de Charles Gide qui vous le rappelle.
Ses nombreux acteurs, dans les associations et les coopératives notamment, sur les territoires de notre pays, mais également de l’Europe entière, voire d’autres continents – je pense bien sûr à l’Amérique du Sud –, ont une bonne longueur d’avance sur les politiques institutionnelles en la matière. C’est d’ailleurs là leur première caractéristique : ils sont à la pointe de l’innovation sociale, au service du développement de l’économie coopérative, de l’économie associative, de l’économie démocratique. Ils innovent, tant sur la forme de l’entreprise que sur le fond, à savoir les activités qu’ils développent en réponse à des besoins sociaux ou environnementaux avérés.
Alors que l’économie dominante se préoccupe de faire des profits, souvent au mépris des conséquences sociales et écologiques de son activité, la crise nous invite à nous interroger plus encore sur les finalités de l’économie.
Les entreprises de l’ESS placent l’humain et le projet collectif au coeur de leur objet ; elles couvrent des champs d’intérêt général et des secteurs très diversifiés ; elles développent des activités ou des services dans les domaines de l’environnement, de l’habitat, du service aux personnes et aux entreprises, du développement local, du patrimoine, des énergies renouvelables, ou encore de la santé ; elles proposent de nombreuses opportunités d’emploi et des carrières diversifiées : un emploi sur cinq est aujourd’hui créé dans le secteur de l’ESS.
Dans le contexte actuel, nous devons conforter le dynamisme et l’inventivité des acteurs de l’ESS, qui présentent le double avantage d’ancrer de nouveau l’économie dans le réel tout en contribuant à soutenir nos concitoyens les plus fragiles.
Je veux pour preuve de ce dynamisme la mobilisation des acteurs du secteur dans la préparation des travaux parlementaires et leur contribution à nos réflexions, comme j’ai pu le mesurer avec mes collègues rapporteurs pour avis. La densité de ces échanges est la démonstration d’une véritable culture participative et l’illustration d’un dialogue social effectif. De fait, l’ESS se caractérise également par sa capacité à mobiliser les citoyens. Nous devons soutenir cette démarche dans une période où le repli sur soi fragilise nos démocraties.
Il était donc temps que l’ESS trouve un meilleur portage politique. En effet, il s’agit d’une économie non de la réparation, mais bien de la transformation. Ce portage politique a été, au cours de l’année écoulée, à la hauteur de l’enjeu. Je veux, à mon tour, saluer le travail de préparation de ce texte conduit par Benoît Hamon, désormais ancien ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire. Nous accueillons aujourd’hui avec confiance Mme Valérie Fourneyron, nouvellement chargée par le Gouvernement de suivre le débat parlementaire, puis de veiller à la bonne mise en oeuvre de cette loi qui, plus que d’autres, croisera les réformes à venir en matière de décentralisation et de fiscalité locale.
La commission des lois a adopté quatorze amendements. Dans la mesure où, me semble-t-il, les débats ont parfois été inaboutis sur certains d’entre eux en commission des affaires économiques, j’en ai de nouveau déposé douze.
À l’article 1er, la commission des lois a prévu la possibilité d’une meilleure association des salariés aux réalisations et à la gouvernance des entreprises de l’ESS. Au même article, elle a proposé que les sociétés commerciales qui souhaitent se prévaloir du secteur soient tenues de produire tous les cinq ans les éléments établissant qu’elles en respectent toujours les conditions.
À l’article 2, elle a souhaité faire de la contribution au développement durable, dans toutes ses dimensions, une condition en soi de l’utilité sociale.
Après l’article 6, elle a adopté trois amendements. Le premier vise à augmenter l’abattement sur la taxe sur les salaires acquittée par des entreprises qui relèvent de l’ESS. Le deuxième tend à inscrire les formations à l’entrepreneuriat dans le champ de l’ESS, parmi les formations éligibles au compte personnel de formation. Le troisième prévoit de garantir la représentation de l’ESS dans les instances de dialogue social au niveau national et interprofessionnel.
À l’article 9, elle a proposé trois amendements, dont l’un vise à inclure l’État dans la liste des pouvoirs adjudicateurs tenus d’adopter un schéma de promotion des achats publics socialement responsables.
L’article 10 ayant disparu, le débat sur la question de l’appel à initiatives, notamment, reviendra sûrement à propos de l’article 40.
À l’article 13, la commission des lois a proposé d’encourager les salariés d’une coopérative à en acquérir des parts sociales. L’amendement vise à préciser qu’ils pourront détenir jusqu’à 20 % des droits de vote. Je suis sûr, madame la secrétaire d’État, que nous reviendrons sur cette question dans le cours du débat.
Pour conclure, la commission des lois a émis un avis favorable à l’adoption du projet de loi, tel que modifié par les amendements qu’elle a adoptés. Je remercie ses membres et particulièrement son président, Jean-Jacques Urvoas, pour la qualité du travail effectué, ainsi que les administrateurs qui m’ont accompagné dans cette première expérience en qualité de rapporteur pour avis.