Intervention de Jean-Philippe Girard

Réunion du 7 mai 2014 à 9h30
Commission des affaires économiques

Jean-Philippe Girard, président de l'Association nationale des industries agroalimentaires, ANIA :

Mme la présidente, je souhaite vous remercier pour cette invitation, car ces sujets sont en effet essentiels, et pour votre présentation de la filière.

Je suis accompagné de MM. Hubert François, qui a travaillé dans l'un des plus grands groupes français de meunerie et est président-directeur général d'Eurogerm et Patrice Robichon qui préside la plateforme « Food for life ».

Les industries agroalimentaires représentent près de 12 000 entreprises implantées sur l'ensemble du territoire national. Elles sont de tailles très diverses puisque le secteur compte 96 % de PME et des groupes de taille mondiale. Elles contribuent à assurer une vie et un avenir à nos territoires. Elles représentent un chiffre d'affaires de 160 milliards d'euros et emploient près de 500 000 salariés. Elles assurent le deuxième poste excédentaire de la balance commerciale française.

Nous nous trouvons pourtant devant un paradoxe. Les consommateurs apprécient nos produits mais n'aiment pas notre industrie.

Notre chiffre d'affaires est de 44 milliards d'euros à l'exportation, ce qui reste très important. Mais il convient de noter que nous avons perdu trois places dans le classement des exportateurs mondiaux. Nous devons poursuivre l'objectif de revenir en tête de ce classement, en s'appuyant de concert sur la compétitivité coût et la compétitivité hors coût. Nous avons des atouts à faire valoir car dans de nombreux pays du monde, on a envie de consommer français.

Il faut être conscient du fait que les industries agroalimentaires consomment 70 % de la production agricole française. Il s'agit donc de raisonner à l'échelle de la filière alimentaire dans son ensemble. C'est tout l'enjeu du comité de filière.

L'une de nos principales préoccupations actuelles est la mortifère guerre des prix que se livrent les enseignes de la grande distribution. Cette guerre est néfaste pour l'emploi et l'investissement dans toute la filière. Les entreprises ont subi une diminution de 14 points de marge en l'espace de dix ans. 5 000 emplois ont été supprimés en 2013. La guerre des prix n'est même plus dans l'intérêt du consommateur.

S'agissant de l'innovation, il s'agit d'un enjeu important de compétitivité. Certes, ce ne sont pas forcément des innovations de rupture, comme dans les secteurs technologiques, mais elles permettent d'améliorer les produits d'un point de vue nutritionnel, sensoriel, ou fonctionnel via son emballage, sa praticité ou sa mise à disposition. L'innovation est permanente dans le secteur agro-alimentaire, même si nous sommes parfois les oubliés ou les mal-aimés en la matière. A titre d'exemple, historiquement on associe beaucoup l'innovation aux produits surgelés, congelés ou appertisés. Mais n'ayons pas peur ! Ces produits sont de merveilleuses technologies au service du consommateur. Depuis des siècles, nous avons oeuvré à renforcer la sécurité des produits au travers de ces technologies. Comme bien souvent, l'abus est nuisible, mais ces nouveaux process ont apporté davantage de qualité, de sécurité et de diversité aux consommateurs.

Par ailleurs, il nous faut faire face à l'évolution des modes de consommation : on ne mange plus comme avant ! Lorsque j'étais enfant, on passait à table à midi et on y restait jusque vers 16 heures ou 17 heures le dimanche, le déjeuner était une véritable réunion de famille. Aujourd'hui, les enfants mangent de leur côté, la télévision est allumée… Il nous faut donc adapter notre offre à cette nouvelle forme de consommation, en travaillant toujours à l'amélioration sécuritaire et qualitative du produit. J'avoue avoir du mal à supporter la succession d'émissions à charge depuis un an. Certes, il y a quelques entreprises défaillantes, qu'il faut écarter et sanctionner. Mais la grande majorité des douze mille entreprises du secteur travaille à l'amélioration nutritionnelle des produits. Quand on parle de sel, de sucre ou de gras, croyez-moi bien, pas une seule entreprise en France ne travaille pas à l'amélioration de ses produits.

Avant d'être le président de l'ANIA, je suis surtout le président-fondateur d'une entreprise du secteur, Eurogerm, qui a vécu et traversé la crise. Spécialisée dans les ingrédients céréaliers, Eurogerm a traversé cette période difficile grâce à l'innovation : c'est notre capacité à innover en termes de produits et de services qui nous a permis de mieux résister et de mieux nous préparer, ainsi que nos clients, à l'avenir de cette industrie. Vous le savez, l'Exposition universelle de 2015, à Milan, aura pour thème « nourrir le monde ». Ce thème nous passionne et s'il y a un pays susceptible de prétendre nourrir le monde, c'est bien la France ! Il est temps d'agir pour ne pas se laisser laminer et dépasser par les autres pays, et de reprendre la main sur un secteur structurant pour notre pays.

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