Intervention de Jacques Moignard

Séance en hémicycle du 15 mai 2014 à 15h00
Droit à l'information dans le cadre des procédures pénales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Moignard :

Il est donc intéressant que notre Parlement l’ait précisé.

La deuxième modification notable découlant de cette CMP concerne le droit de la garde à vue, droit ô combien débattu ces dernières années. La rédaction retenue par la commission prévoit que dans le cas d’une demande de prolongation de garde à vue présentée au procureur de la République ou au juge des libertés, si le suspect n’est pas reçu par le magistrat, ce premier pourra lui communiquer ses observations, via un procès-verbal établi par l’officier de police judiciaire.

La rédaction initiale prévoyait « des observations écrites », ce qui posait le problème de l’accès à l’écriture. En effet, quid des personnes illettrées ou ne parlant que peu ou pas notre langue ? Comment formuler une requête quand on ne parle pas ou n’écrit pas le Français ? Cela doit-il empêcher l’accès aux droits de la défense ? Non, bien sûr que non. Il était important de s’en préoccuper. Tout le monde doit pouvoir faire valoir son droit à se défendre, lettré, illettré, francophone ou non, détenu ou libre. C’est un droit fondamental que notre République se doit de protéger.

Le dernier point soulevé par la commission mixte paritaire qui mérite qu’on s’y attarde concerne l’article 6 et l’accès au bulletin n°1 qui est l’un des trois bulletins qui composent le casier judiciaire. Il comporte l’ensemble des condamnations et décisions portées au casier judiciaire. Actuellement, la demande de ce bulletin est réservée aux autorités judiciaires et aux greffes des établissements pénitentiaires dans le cadre de l’instruction de certaines mesures d’exécution de la peine d’emprisonnement. Les avocats y ont accès, à de rares occasions, sur dérogations spéciales.

La transmission d’une copie du dossier dans son intégralité aux avocats et aux parties pose un problème quand il s’agit de ce bulletin, comme l’a fait très justement remarquer notre collègue Dominique Raimbourg lors de la CMP. S’il est très difficile à l’heure actuelle d’avoir accès au bulletin n°1, cette difficulté disparaît avec l’article 6. Mais contrairement aux apparences, l’accès à cette pièce n’est pas forcément dans l’intérêt de la personne concernée. Puisqu’elle pourra désormais obtenir copie de cette pièce, elle sera dès lors exposée au risque qu’on la lui demande, par exemple lors d’un recrutement professionnel. Nous savons déjà à quel point la réinsertion dans la vie professionnelle est difficile suite à une peine de prison, le vide qu’elle laisse sur un CV peut être lourd de conséquences et entraver les chances de réinsertion sociale et ainsi augmenter le risque de récidive.

La CMP a fait le choix de supprimer les termes « y compris les éléments de personnalité et le bulletin n°1 du casier judiciaire ». C’est une question critique. Comment concilier les droits de la défense, le droit européen, les demandes des avocats et l’intérêt de la personne condamnée ? Bien que satisfait de la solution trouvée par la CMP, la question mérite peut être plus mûre réflexion.

Le groupe RRDP soutient ce texte et le votera, satisfait qu’il soit voté dans le temps imparti par le Parlement européen et estimant qu’il fait progresser de façon positive notre droit.

Enfin, je tiens à remercier Mme la ministre pour son appel à la mobilisation, pour une construction active de l’Europe, afin que nos institutions soient véritablement au service des citoyens de chaque pays qui compose notre Europe, et donc au service des Européens que nous sommes.

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