Intervention de Christiane Taubira

Séance en hémicycle du 15 mai 2014 à 15h00
Droit à l'information dans le cadre des procédures pénales — Discussion générale

Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice :

M. Vigier est parti, mais je tiens également à lui répondre parce que je ne doute pas qu’il exprimait une véritable préoccupation. Il indiquait que l’audition libre allait durer quatre heures : c’est une erreur. L’audition libre n’a pas de limite – c’est d’ailleurs un reproche que vous lui faites – pour une raison toute simple : la personne entendue dans le cadre d’une audition libre est libre, justement, de quitter les locaux d’enquête à tout moment. Les quatre heures qu’évoquait M. Vigier concernent l’audition d’un témoin sous contrainte. Nous ne sommes pas dans le cas de l’audition libre, que nous sommes en train d’encadrer juridiquement.

Monsieur Roumegas, vous avez fait allusion au rendez-vous que nous prenons pour la transposition de la directive relative à l’accès à l’avocat, dont l’échéance arrive à la fin de l’année 2015 – c’est celle sur les victimes qui arrive à échéance fin 2016. Nous allons transposer bien avant, mais nous allons travailler en amont.

Vous avez espéré que ce travail sera effectué et que la transposition sera réelle avant une éventuelle condamnation par l’Union européenne. Il ne peut pas y en avoir, pour la simple raison que nous avons ce délai pour la transposition de la directive C relative à l’accès à l’avocat. Mais puisque vous avez fait un peu d’ironie, je me permets d’en faire très cordialement en retour : vous avez dit vous-même que pour la directive B du droit à l’information, ce n’est pas dans la lettre mais dans l’esprit du texte que l’Union européenne envisage l’accès à l’entier dossier. Comme nous ne risquons pas d’être condamnés pour avoir manqué à l’esprit d’une directive, ce risque est je crois totalement inexistant !

Cela étant, j’en profite pour dire que, sur ce sujet, nous convergeons. Les débats en première lecture l’ont montré, nous sommes persuadés qu’il faut développer les droits de la défense : pour l’efficacité même de l’enquête, pour l’efficacité même de l’audition ou de la garde à vue, il faut effectivement que l’avocat ait accès à des pièces du dossier, pour assister son client de façon plus utile et plus efficace. Simplement, il faut veiller quand même à l’efficacité des enquêtes et le droit communautaire lui-même prévoit qu’un certain nombre de pièces ne puissent pas être communiquées, soit par nécessité de l’enquête, soit pour la sécurité des personnes.

Le droit communautaire lui-même n’envisage pas la transmission en totalité du dossier. Il nous faut travailler ce point et c’est aussi ce que va faire la mission Beaume, de façon à ne pas générer des contentieux en cascade parce que nous n’aurions pas défini très clairement et très précisément les pièces du dossier qui peuvent échapper à la communication.

Je rappelle en outre ce que je disais en première lecture, à savoir que le dossier s’élabore au fur et à mesure de l’audition et de la garde à vue. Par conséquent, il faut aussi définir le moment auquel on a accès au dossier : quand une commission rogatoire les conduit à interpeller une personne, les enquêteurs n’ont pas forcément accès à la totalité du dossier.

Mesdames, messieurs les députés, je vous adresse à nouveau mes remerciements pour la qualité du travail effectué en première lecture, sachant que l’excellent travail de la commission mixte paritaire a accompli le miracle d’obtenir le vote du groupe UMP. Si je m’en tiens en effet à ce que vous avez dit à la tribune, monsieur le député Geoffroy, votre satisfaction est évidente quant à ce travail – je puis d’autant plus le souligner que je ne suis pas membre de la CMP, et que je n’ai donc aucun mérite.

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