Intervention de Pierre Léautey

Séance en hémicycle du 15 mai 2014 à 15h00
Économie sociale et solidaire — Après l'article 44

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Léautey, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation :

Je vais être un peu plus long dans la présentation de cet amendement qui concerne la prémajorité. En effet, la commission des affaires culturelles a adopté deux amendements qui réforment le droit de la prémajorité associative, c’est-à-dire le droit pour les mineurs de participer à la vie associative.

Ayant pris bonne note des remarques formulées par certains de mes collègues lors des débats, j’ai souhaité travailler avec le rapporteur Yves Blein à une nouvelle version de ces amendements. Je retirerai donc l’amendement de la commission des affaires culturelles no 143, et je ferai de même pour l’amendement n° 144 , au profit de l’amendement n° 456 que j’ai cosigné avec Yves Blein et qui a été approuvé par la commission des affaires économiques.

Ces amendements visent un même but : revenir sur ce qu’a fait le législateur en 2011 pour mieux retrouver l’esprit de la loi de 1901 qui, somme toute, a bien fonctionné pendant 110 ans.

Entre 1901 et 2011, dans le silence de la loi, la jurisprudence avait reconnu aux mineurs, en 1965, le droit d’adhérer seul à une association. Dans l’amendement nous intégrons donc cette jurisprudence.

Par ailleurs, avant 2011, il était admis par la jurisprudence que les mineurs pouvaient accéder seuls à certaines responsabilités associatives dès lors que cela n’entraînait pour eux aucune conséquence financière notable. Toutefois, dans le silence de la loi, certaines préfectures qui ne l’entendaient pas ainsi avaient refusé l’enregistrement des déclarations.

L’objet de la loi de 2011 en son article 2 bis était de mettre fin à ces refus injustifiés : une très bonne intention dont les conséquences se sont révélées néfastes car les dispositions ont constitué un frein à la prise de responsabilité des mineurs.

En effet, la rédaction retenue ne nous apparaît pas satisfaisante : en fixant un âge à partir duquel les mineurs peuvent créer et gérer une association, le législateur a privé les mineurs de moins de seize ans du droit de créer une association. De surcroît, pour les plus de seize ans, il a introduit une autorisation écrite préalable des parents, laquelle, dans les faits, limite considérablement l’accès des jeunes aux responsabilités associatives.

Il a aussi fragilisé le Réseau national des juniors associations, créé en 1998 et dont l’action peut désormais apparaître comme un détournement de loi puisqu’il confie des responsabilités associatives à des mineurs de moins de seize ans.

Cet amendement nous semble donc nécessaire parce que, d’une part, il intègre à la loi la jurisprudence relative à l’adhésion des mineurs et, d’autre part, il va permettre à des mineurs doués de discernement de créer et de gérer une association. Le juge retient d’ailleurs ce critère du discernement : les actes effectués par des mineurs ne sont pas systématiquement frappés de nullité et sont parfois jugés tout à fait valables.

Toutefois, j’ai bien pris en compte les remarques justifiées de nos collègues, notamment de Mme Nachury qui ne sera pas là pour défendre l’amendement qu’elle avait déposé pour revenir sur cette limite des seize ans.

J’ai donc modifié mon amendement en posant trois verrous : les mineurs ne pourront en aucun cas réaliser des actes de disposition ; ils devront se limiter à des actes d’administration qui peuvent être assimilés à des actes de la vie courante pour le compte de l’association ; les parents seront nécessairement informés de l’accès officiel du mineur à des responsabilités associatives et ils pourront s’y opposer.

Il me semble que ce dispositif est relativement équilibré et qu’il permet d’inciter les jeunes à s’insérer dans les associations.

Le législateur doit veiller à ne pas trop restreindre la capacité des mineurs à agir dans le cadre associatif alors que ces mêmes jeunes peuvent effectuer seuls de très nombreux actes de la vie courante qui engagent bien davantage leurs parents.

L’objectif est donc de laisser les jeunes de moins de seize ans créer des associations. Bien souvent, ce sont des associations de lecture, des associations de loisirs, des associations de défense des animaux, des associations sportives, que sais-je encore. Elles sont une véritable école de citoyenneté, que nous devons encourager. On le sait aussi : plus tôt les jeunes s’investissent et prennent des responsabilités dans la vie associative, plus ils en prendront à l’âge adulte et plus ils participeront activement à la vie civique.

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