Intervention de Jean-Paul Chanteguet

Réunion du 14 mai 2014 à 10h30
Mission d'information sur l'écotaxe poids lourds

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Chanteguet, président et rapporteur :

Ne disposant pas aujourd'hui de véritables études d'impact économique et financier, je considère qu'il serait indispensable, dans le cadre de la marche à blanc, d'identifier en amont les secteurs d'activité ou filières qui pourraient être confrontés à des difficultés et, pour ce faire, qu'il serait utile de tester à partir d'un échantillon la répercussion de la majoration forfaitaire sur les chargeurs.

Si certains pensent que le Pacte d'avenir pour la Bretagne présenté par le Premier ministre le 13 décembre 2013 peut constituer un cadre propice à la déclinaison de mesures ciblées d'adaptation et d'accompagnement pour les filières qui seraient touchées par l'éco-redevance, d'autres considèrent que la seule réponse consiste à retirer du réseau taxé toutes les routes bretonnes, ce qui pourrait se faire par voie réglementaire après modification de l'article 270 du code des douanes qui définit le réseau taxé. Une telle décision, lourde de sens, devrait être prise par l'exécutif, expliquée et justifiée.

Ces différentes propositions, certains les trouveront peu révolutionnaires. Mais elles ont au moins le mérite de ne pas être farfelues. Nous respectons tout d'abord la parole et la signature de l'État puisque nous considérons que le dispositif technique mis en oeuvre par Ecomouv', après avoir franchi les différents tests de contrôle – vérification d'aptitude au bon fonctionnement (VABF) et vérification de service régulier (VSR) – doit être réceptionné.

Ainsi, en ces périodes d'austérité budgétaire, nous préservons les intérêts de l'État, car une résiliation, voire une déchéance, coûterait au bas mot 800 millions d'euros. De plus, en ne remettant pas en cause fondamentalement le cahier des charges, nous limitons la facture du temps qui passe, facture qui s'élève chaque mois à près de 100 millions d'euros.

En accentuant la modulation des taux de la redevance et en créant un fonds de modernisation de la flotte de poids lourds, nous renforçons l'effet environnemental de l'éco-redevance.

Avec la marche à blanc, nous facilitons la montée en puissance du dispositif et limitons les risques d'enrayement.

Nous confirmons l'engagement pris auprès des organisations professionnelles du secteur des transports de répercuter l'éco-redevance sur les chargeurs et affréteurs au moyen d'une majoration forfaitaire.

Nous redonnons de l'acceptabilité au dispositif en proposant le maintien pendant au moins trois ans d'un taux moyen de 13 centimes d'euros pour que les entreprises bénéficient d'une certaine visibilité, en adaptant la majoration forfaitaire aux spécificités de certaines activités, en simplifiant les procédures d'enregistrement des transporteurs auprès d'Ecomouv' et en acceptant des exonérations limitées.

Enfin, conscients que le dispositif tel qu'il est défini aujourd'hui pénaliserait l'économie de proximité à travers ceux qui n'ont aucune possibilité de réduire leur usage de la route, nous proposons de créer une franchise mensuelle kilométrique de 400 kilomètres, convertie en euros. Elle sera favorable à ceux qui effectueront de courts trajets, aux utilisateurs occasionnels, à ceux pour lesquels le transport n'est pas généralement l'activité principale ou à certaines filières économiques intensives en transport. Elle bénéficiera davantage aux poids lourds circulant sur le réseau des régions périphériques, comme la Bretagne, ainsi qu'à ceux qui provoquent le moins de dommages à la chaussée et sont les moins polluants.

Face à la diminution des recettes attendue, de l'ordre de 300 millions d'euros, nous pensons que le report de trafic vers les autoroutes, générateur de recettes additionnelles de péage comprises entre 300 et 400 millions d'euros, serait créateur d'un effet d'aubaine qui mériterait sans nul doute d'être partagé, une telle situation pouvant justifier une renégociation partielle des concessions du fait d'une modification substantielle de leurs conditions économiques.

De plus, l'augmentation mécanique de la taxe d'aménagement du territoire et de la redevance domaniale permettrait de présenter un bilan financier légèrement dégradé, mais préservant l'essentiel des moyens de l'AFITF.

J'ai par ailleurs reçu des contributions : de M. Joël Giraud, des élus écologistes, de M. Patrice Carvalho, celle de Mme Corinne Erhel, de M. François André, de Mme Marie-Anne Chapdelaine, de M. Richard Ferrand, de Mme Viviane Le Dissez, de MM. Jean-Pierre Le Roch, Hervé Pellois et celle de M. Marc Le Fur, de Mme Isabelle Le Callennec et de MM. Philippe Le Ray et Gilles Lurton.

Je conclurai en vous remerciant, chers collègues, de votre écoute et de votre mobilisation sur ce dossier. Au cours d'échanges parfois animés, nous avons fait preuve de notre sens des responsabilités et je comprends que nous puissions avoir des points de vue différents. Je me suis efforcé, pour ma part, de tenir une ligne droite tout au long de nos travaux.

Mais ce dossier ne se referme pas là : il appartient désormais au Gouvernement de reprendre – ou non – les propositions formulées.

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