Intervention de Hervé Mariton

Réunion du 14 mai 2014 à 10h30
Mission d'information sur l'écotaxe poids lourds

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Mariton :

Nous serons sans doute nombreux, monsieur le président, à rendre hommage à la qualité de votre travail et à la clarté de votre analyse et de vos propositions.

Je ne voterai toutefois pas ce rapport, mais je ne voterai pas contre : je m'abstiendrai pour des raisons de cohérence que j'exposerai dans un instant.

Je veux en effet rappeler au préalable que, voilà quelques années, j'avais moi-même publié plus modestement, au nom de la commission des finances, un rapport sur la taxe poids lourds qui faisait déjà apparaître les difficultés prévisibles que rencontrerait la mise en oeuvre d'un tel dispositif et l'importance qu'il y aurait à mieux l'expliquer et à anticiper en particulier l'accompagnement de l'industrie du transport. J'avais souligné l'effet d'aubaine dont bénéficieraient probablement les sociétés autoroutières et l'importance qu'il y aurait à examiner les moyens par lesquels l'État pourrait récupérer une partie de ces bénéfices.

La première raison pour laquelle je ne voterai pas votre rapport tient à l'appellation du dispositif : il s'agit bien d'une taxe, et non pas d'une redevance, comme vous l'indiquez du reste très honnêtement dans le rapport même. De fait, il n'y a pas de retour au secteur prélevé et l'affectation à l'AFITF en fait bien une taxe. Ce n'est pas la gestion politique du vocabulaire qui rendra un impôt plus acceptable, mais plutôt l'explication et le bon usage. Le mot « redevance » a certes été utilisé lors du Grenelle de l'environnement, mais il n'était pas juste. Puisque les évolutions que vous préconisez nécessiteront un vote en loi de finances, il faudra revenir sur ce point.

La deuxième raison de mon abstention tient au mécanisme de répercussion. Je ne l'avais pas approuvé en son temps, et le groupe auquel j'appartiens avait d'ailleurs fait devant le Conseil constitutionnel un recours tout à fait justifié politiquement même s'il n'a pas prospéré, car la « répercussion Cuvillier » est plutôt un facteur de confusion.

Cela étant, nous sommes plusieurs à voir dans l'écotaxe une possibilité de financement des infrastructures. D'autre part, il y a une certaine cohérence à poursuivre, comme vous le souhaitez, le travail réalisé très en amont avec les transporteurs, qui se sont assez largement engagés – parfois au-delà de ce que je pensais justifié – pour la mise en place de l'écotaxe.

Surtout, il y aurait aujourd'hui plus d'inconvénients que d'avantages à abandonner en cours de route l'écotaxe, même s'il faut l'améliorer et la réformer. Ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain, car il faut assurer le financement des infrastructures et les dédits auraient un coût important, pour nos finances comme pour la parole de l'État. Lorsqu'un partenariat public privé de cette nature a été engagé, si l'on veut que la parole de l'État soit crédible dans la durée, on ne peut pas se dédire capricieusement.

Vous avez aussi, monsieur le président, souligné courageusement que certaines pistes évoquées par le Gouvernement n'étaient pas crédibles, comme la taxation des seuls transporteurs étrangers ou la taxation autoritaire des sociétés autoroutières. En revanche, la captation d'une partie de l'effet d'aubaine sur les fondements que vous avez exposés est une idée qui « tient la route ».

Voilà donc les points qui expliquent mon vote d'abstention.

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