Intervention de Élisabeth Guigou

Réunion du 14 mai 2014 à 11h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉlisabeth Guigou, présidente :

Nous avons déjà eu l'occasion, au sein de cette commission, de délibérer sur ces négociations. Nous avons en effet adopté, il y a pratiquement un an jour pour jour, sur le rapport de Seybah Dagoma, une résolution européenne qui énonçait les quatre lignes rouges que le Gouvernement a soutenues à propos du mandat de la Commission européenne :

– l'exception culturelle : l'audiovisuel est clairement exclu du mandat de la Commission ;

– l'exclusion du secteur de la défense des négociations : nous avons également obtenu satisfaction ;

– la protection de nos préférences collectives. En ce qui concerne le boeuf aux hormones et le poulet au chlore, les choses sont claires : ils ne pourront être importés dans l'Union ; quant aux OGM, les normes européennes continueront à s'appliquer ;

– le refus du dispositif obligatoire d'arbitrage qui se substituerait aux juridictions nationales.

Sur ce dernier point, le mandat de la Commission mentionne l'inclusion éventuelle d'un « mécanisme efficace et moderne de règlement des différends entre les investisseurs et l'Etat », sans préciser s'il s'agirait ou non du fameux CIRDI, utilisé dans le cadre de l'ALENA. Les États ont précisé le mandat de la Commission afin de mieux protéger le droit européen et la compétence des États à légiférer. Par ailleurs, la Commission, réagissant aux inquiétudes des États, a lancé une consultation publique pour déterminer les conditions d'inclusion d'un mécanisme d'arbitrage. Nous défendons le principe que les entreprises américaines ne doivent pas pouvoir remettre en cause notre législation à travers un tel mécanisme. C'est évidemment un point sur lequel il faudra être extrêmement vigilant.

Nous poursuivons également dans ces négociations des objectifs offensifs. Ne négligeons pas les intérêts de notre pays à une plus grande ouverture des marchés américains. L'économie américaine est en croissance – 2,8 % en 2014 – alors que la croissance dans la zone euro est plus faible. Nous avons avantage à démanteler des barrières tarifaires dans des secteurs comme le textile, les produits laitiers. L'harmonisation des normes européennes et américaines est aussi un enjeu majeur pour le développement de nos exportations. L'un de nos principaux objectifs est aussi d'obtenir des garanties quant à la réciprocité de l'accès aux marchés publics, le marché européen étant ouvert à plus de 80 %, alors que le marché américain est ouvert à 25% seulement.

Ces négociations sont loin d'être terminées. Les Américains en particulier n'entendent pas les achever avant le mid-term. Nous sommes donc dans une phase où il convient d'être vigilants et de défendre nos conceptions, sans qu'il soit à ce stade nécessaire de renverser la table.

Il convient naturellement de veiller à ce que la transparence des négociations soit beaucoup plus grande. Je partage à cet égard le point de vue de la proposition de résolution initiale qui, en son alinéa 16, déplore que les négociations ne répondent pas aux exigences démocratiques en matière de transparence. Notre commission suivra très attentivement ces négociations. L'année dernière, nous avions créé un groupe de travail sur ce sujet. Nous pourrions le réactiver ou en créer un autre. Je suis en revanche beaucoup plus réservée quant à la dénonciation de la légitimité des négociateurs sur laquelle j'ai déposé un amendement de suppression que je défendrai tout à l'heure.

Au terme de ces négociations, il nous reviendra d'établir la balance des avantages et inconvénients de l'accord qui aura été défini et il sera encore possible de le rejeter :

– soit par une décision du Conseil européen qui statue dans ce domaine à l'unanimité ; c'est-à-dire qu'il suffit qu'un État refuse l'accord pour qu'il ne soit pas adopté par le Conseil ;

– soit par une décision du Parlement européen qui statue à la majorité.

– soit, enfin, lorsque l'accord sera soumis aux 28 parlements nationaux pour ratification.

Je remercie par conséquent le groupe GDR d'avoir pris cette initiative et permis que nous ayons un débat en séance sur ce sujet, mais pour toutes les raisons que je viens d'exposer, je suis pour ma part favorable globalement au texte de la commission des affaires européennes sous réserve de l'amendement que j'évoquais tout à l'heure.

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