La présidente a rappelé le caractère hybride de cette proposition de loi qui reprend des dispositions d'origine gouvernementale, en l'occurrence l'article 20 du projet de loi relatif à la formation professionnelle. Après le rejet de cet article par le Sénat, il a été décidé de ne pas le rétablir afin de permettre une entrée en vigueur rapide de la loi, sans pour autant renoncer à la réforme de l'inspection du travail.
L'article 20 présentait une réforme globale comprenant à la fois des dispositions réglementaires et législatives. Le ministre du travail n'a pas souhaité différer l'entrée en vigueur de la restructuration de l'inspection du travail, qui est donc l'objet du décret du 20 mars 2014 relatif à l'organisation du système d'inspection du travail. Jusqu'à présent, l'inspection du travail était organisée en sections d'inspection, comprenant un inspecteur, deux contrôleurs et des personnels de support. Désormais, elle est composée d'unités de contrôle régionales, réunissant huit à douze personnes sous l'autorité d'un responsable, et d'un groupe d'appui national. Une partie de la proposition de loi qui vous est soumise vise à tirer les conséquences de cette réorganisation.
Dans sa décision du 17 janvier 2008, le Conseil constitutionnel fait valoir que le principe de l'indépendance de l'inspection du travail fait partie des principes fondamentaux régis par l'article 34 de la Constitution, mais que ses modalités d'application relèvent du pouvoir réglementaire. La réforme législative ne peut néanmoins pas s'envisager indépendamment de son versant réglementaire déjà mis en oeuvre.
Deux chiffres méritent d'être rappelés en préambule : l'inspection du travail, ce sont 2 200 agents de contrôle pour 1,8 million d'entreprises concernées. Cette faiblesse numérique justifie que les agents soient dotés d'outils adaptés à l'exercice de leur mission. Le texte répond à cette exigence.
Il faut également rappeler que le rôle de l'inspection du travail ne se limite pas à l'investigation, à la contrainte et à la sanction. Les inspecteurs du travail sont présents dans les entreprises pour les contrôler, mais aussi pour nouer un dialogue avec elles. Les suites données aux contrôles effectués ne sont pas nécessairement répressives – il peut s'agir de lettres d'observation ou de conseil. La relation, au demeurant singulière, entre l'entreprise et l'inspection du travail est souvent empreinte de confiance. Les inspecteurs ont pour mission d'améliorer les conditions de travail des salariés et de veiller à la conformité à la loi de celles-ci. Pour ce faire, ils usent d'abord de moyens de conviction et d'information. Si ces derniers s'avèrent insuffisants, il reste aux agents de contrôle à employer des moyens contraignants.
L'article 1er répond à la critique qu'on a pu adresser à la réforme, qui porterait atteinte à l'indépendance de l'inspection du travail. Celle-ci est pourtant garantie par la convention n° 81 de l'Organisation internationale du travail (OIT) dont la valeur juridique est supérieure à celle de la loi.
Il affirme le principe de l'indépendance de l'inspection du travail en inscrivant dans le code du travail sa définition et les moyens de son exercice.
En outre, l'article 1er tire les conséquences de la fusion des corps de contrôleurs et d'inspecteurs en un corps unique d'agents de contrôle. Enfin, il étend les compétences de l'inspection du travail à la répression de la traite des êtres humains.
L'article 2 introduit des sanctions administratives. Sachez que seuls 6 000 procès-verbaux sont établis chaque année, soit trois par agent en moyenne. Ce chiffre était de 25 000 il y a quelques années. Pour expliquer cette baisse du nombre de procès-verbaux, on peut avancer la faiblesse des suites judiciaires qui leur sont données. Dans deux tiers des cas, ces derniers ne donnent pas lieu à des poursuites, car les priorités judiciaires sont autres et les infractions au droit du travail parfois très techniques et chronophages.
Il en résulte une autocensure de la part des inspecteurs et des contrôleurs qui ne veulent pas prendre le risque d'un classement sans suite. La répression ne s'exerce pas, y compris lorsqu'elle se justifie.
Les procès-verbaux révèlent l'échec des moyens de persuasion. Ils représentent 4 % de l'ensemble des infractions relevées. Compte tenu des chiffres précédents, cela signifie que 1 % des infractions font l'objet de poursuites.