Au nom du groupe SRC, je veux rendre hommage au travail du rapporteur qui a mené de nombreuses auditions afin d'améliorer encore la proposition de loi directement issue du texte adopté par notre assemblée sur la formation professionnelle. Nos débats s'étaient alors focalisés sur la réorganisation de l'inspection du travail, qui, depuis, a fait l'objet du décret du 20 mars 2014 et sur laquelle les organisations syndicales restent divisées.
Je souhaite à cet égard souligner deux difficultés à laquelle se heurte la réforme : d'une part, la réserve souvent exprimée des agents envers leur hiérarchie, et d'autre part, une certaine méfiance entre contrôleurs et contrôlés, les premiers craignant pour leur indépendance, même si elle est garantie par les textes en vigueur, les seconds plaidant pour toujours moins de contrôles.
La proposition de loi réaffirme l'indépendance dans son article 1er, reprenant ainsi l'amendement qu'avaient défendu le rapporteur, Jacqueline Fraysse et Christophe Cavard, sur le projet de loi relatif à la formation professionnelle.
Mais « l'indépendance n'exclut pas la coordination », comme l'a dit Christiane Demontés lors des débats au Sénat. En effet, l'exercice solitaire du contrôleur ne doit pas nourrir l'isolement ou le découragement face à la lenteur des procédures. La très grande majorité des contrôles ne donnent lieu qu'à des conseils et à des observations. Cet exercice solitaire peut en outre se heurter au caractère complexe des situations, à l'évolution des techniques et du droit, même si le corps d'inspection peut aujourd'hui faire appel à des personnes qualifiées comme des médecins ou des ingénieurs.
La lutte contre le travail illégal ou l'émergence de nouveaux risques implique la mise en commun de moyens et de compétences qui, à mon sens, n'est pas contradictoire avec la liberté d'initiative laissée aux agents de contrôle sur le terrain. Reste une interrogation sur l'articulation entre les différents niveaux territoriaux d'action institués par le décret.
À rebours des inquiétudes sur l'indépendance, les mesures visant à élargir les pouvoirs de contrôle et de sanction de l'inspection du travail suscitent une large adhésion des représentants syndicaux qui ne va toutefois pas jusqu'à l'unanimité. Les avancées en la matière sont réelles.
Ainsi l'article 2 crée-t-il des amendes administratives, tandis que l'article 3 instaure des sanctions pénales en cas de non-respect d'une décision du DIRECCTE en matière d'hygiène et de sécurité, ainsi qu'en cas d'obstacle ou d'outrage.
La proposition de loi prévoit également un mécanisme de transaction pénale, à l'initiative du DIRECCTE sur la base du procès-verbal de l'agent de contrôle, avec l'accord de l'auteur des faits, la transaction devant être homologuée par le procureur de la République.
L'article 4 élargit les pouvoirs d'intervention du corps d'inspection en matière de santé et de sécurité au travail ; il étend le dispositif d'arrêt temporaire de travaux et d'activité aux autres secteurs que le bâtiment et les travaux publics ; il simplifie le dispositif d'arrêt d'activité en cas d'exposition dangereuse à des agents chimiques cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction ; il donne aux agents de contrôle plus de moyens d'expertise ; enfin, il leur permet l'accès et la copie de tout document utile à leur mission.
Les organisations patronales ont fait part de leur vive hostilité à ces nouvelles mesures, la CGPME dénonçant « une véritable inquisition du travail » et le Medef « de la défiance et de la méfiance envers les entreprises ». Bernard Vivier, directeur de l'Institut du travail, un des relais patronaux souvent invité dans les médias, a déclaré que l'inspection du travail était « la dernière tribu marxiste-léniniste en France », tandis que, dans Le Figaro du 8 avril, l'ancien député UMP Jean-Michel Fourgous affirmait « qu'un inspecteur du travail sur deux était d'extrême gauche » et « qu'ils ne pensaient qu'à neutraliser l'économie de marché ». Bref, des sorties tonitruantes qui ne font guère avancer nos débats...
Les nouvelles dispositions suscitent donc une large approbation de la part des organisations syndicales et une opposition frontale des organisations patronales. J'attends avec intérêt de connaître la position de nos collègues de l'opposition. Rejoindront-ils l'ancien ministre du travail Xavier Bertrand, qui déclarait il y a quelques mois que les missions de l'inspection du travail devaient être strictement limitées à la sécurité et à la santé des travailleurs et au contrôle des travailleurs détachés ?
Le groupe SRC votera cette proposition de loi sur laquelle il a déposé trois amendements portant sur les articles 1 et 4.