Intervention de Jean-Frédéric Poisson

Séance en hémicycle du 19 mai 2014 à 21h30
Autorité parentale et intérêt de l'enfant — Article 4

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Frédéric Poisson :

Je remercie Mme la rapporteure et Mme la secrétaire d’Etat pour leurs explications. Elles me permettront néanmoins de continuer à manifester mon désaccord avec le texte qu’elles ont décrit. Ce désaccord porte sur au moins un point.

Reprenons, en détail, les explications que vous avez données à propos du deuxième alinéa de cet article 4. Je comprends bien ce que sont les droits fondamentaux de l’enfant : on peut définir objectivement cette notion. En revanche, la formule « acte qui rompt avec le passé et engage l’avenir de l’enfant » réserve une marge très large à l’interprétation. Il y a là une source potentielle de désaccords, de contentieux. D’une manière générale, les formulations « rompt avec le passé » et « engage l’avenir » sont beaucoup trop imprécises pour figurer dans une disposition qui peut engager des choses aussi importantes que la garde des enfants, des interdictions ou des aménagements de droits, voire des sanctions pénales ! Ce sont des choses trop importantes pour être traitées avec autant d’imprécision.

Certes, il y a des actes qui apparaissent clairement, avec évidence, comme importants. Mais je vous fais remarquer que dans beaucoup de familles, on ne s’accorde pas toujours sur le poids de certaines décisions au regard de ces deux critères. Tant que nous ne parvenons pas, sur des textes aussi importants, à une rédaction suffisamment claire pour que chacun comprenne dès l’abord, en la lisant, dans quels cas il serait en infraction, il ne faut pas voter cette loi. Je suis désolé de vous dire qu’il ne faut pas écrire cette loi de cette façon !

Enfin, je suis tout à fait d’accord avec un autre argument développé par mes collègues. Comme l’a dit M. Le Fur à l’instant, le mécanisme de cet article 4 conduit, pour les actes considérés comme importants – je rappelle que pour deux actes sur trois, nous sommes incapables en l’état actuel du texte de déterminer précisément s’ils sont « importants » ou « usuels » – à conserver des éléments de preuve. Un jour, éventuellement, on pourra rechercher la trace d’accord exprès. À mon sens, ce mécanisme est d’abord extrêmement compliqué pour les familles qui ne demandent rien. Il conduit aussi à judiciariser à l’excès des situations dans lesquelles personne ne réclame l’intervention du droit, et qui sont à peu près réglées, dans la grande majorité des cas, d’une façon paisible.

Cet article est donc dangereux à plusieurs points de vue : il risque de causer des contentieux et de judiciariser outre mesure les relations familiales. Au total, ce texte provoquera les conflits à l’intérieur des familles plus qu’il ne les résoudra.

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