Intervention de François Brottes

Réunion du 7 mai 2014 à 10h00
Commission d'enquête relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire, à la durée d'exploitation des réacteurs et à divers aspects économiques et financiers de la production et de la commercialisation de l'électricité nucléaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Brottes, président :

On peut dire que cette audition de l'ANDRA, représentée aujourd'hui par Mme Marie-Claude Dupuis, directrice générale, et M. Thibaud Labalette, directeur des programmes, était très attendue. Elle est d'autant plus d'actualité que l'Agence a adopté hier les suites à donner au débat public sur le projet de centre industriel de stockage géologique (Cigéo). Nous venons d'ailleurs d'entendre le responsable de la commission nationale chargée d'organiser ce débat. Ce dernier, qui adopte une stricte neutralité et s'interdit d'avoir un point de vue sur le sujet concerné – ce qui est bien pratique, reconnaissons-le –, a dit de l'ANDRA, pour simplifier, qu'elle informait beaucoup mais pratiquait peu la concertation.

Notre commission d'enquête est sur le point d'achever ses travaux, et elle consacre logiquement ses dernières auditions à la question du traitement des déchets, après avoir examiné tout le cycle de production.

Est-ce le fruit du débat lui-même, qui s'est tenu dans les conditions que l'on sait, ou le résultat d'une réflexion mûrie de la part des experts que vous êtes ? Le conseil d'administration de l'ANDRA a décidé de faire évoluer sur quatre points le projet de centre de stockage en profondeur qui avait été soumis au débat public.

La première évolution est l'intégration d'une phase pilote au démarrage de l'installation. Vous devrez toutefois nous préciser s'il s'agit d'une installation pilote destinée à être abandonnée au moment de l'exploitation industrielle ou plutôt une première tranche du projet Cigéo.

Deuxième évolution, l'exploitation devra être pilotée selon un plan directeur régulièrement révisé. Il semble logique, en effet, de ne pas s'enfermer dans un schéma rigide.

La troisième proposition de l'Agence porte sur le desserrement du calendrier par le découpage du processus de demande d'autorisation de création. On a, en effet, le sentiment – mais peut-être le rapporteur me contredira-t-il sur ce point – qu'il est possible de recourir pendant encore plusieurs dizaines d'années au stockage en subsurface. La pression est donc moins forte et nous disposons de plus de temps pour trouver une solution alternative, que l'on soit ou non favorable au stockage en profondeur. C'est d'autant plus vrai que, s'agissant d'une opération aussi importante, on finit par multiplier les malentendus en voulant précipiter l'allure.

Enfin, la quatrième évolution tend à améliorer l'implication de la société civile dans le dossier. C'est une des interrogations nées du débat public : une telle implication peut-elle s'inscrire dans la durée, à l'instar de l'action menée par les commissions locales d'information (CLI) ?

L'histoire dira si ces aménagements auront permis d'ouvrir la voie à la création d'un site de stockage géologique profond, dont je rappelle qu'il s'agit de la solution de référence retenue par la législation pour la gestion de déchets de haute et moyenne activité à vie longue, en France comme dans de nombreux autres pays. Le Parlement a souhaité que les colis de déchets soient récupérables, dans l'hypothèse où l'on parviendrait à développer une technologie permettant d'en neutraliser la radioactivité. À cet égard, le débat entre récupérabilité et réversibilité n'est pas seulement de nature sémantique, puisqu'il a une incidence sur les coûts.

En tout état de cause, on peut saluer la volonté de l'ANDRA de mieux impliquer le public dans la gouvernance de ce projet. Ce n'est pas facile, compte tenu de la virulence de certains propos, et force est de reconnaître qu'il existe des postes moins exposés que le vôtre, madame Dupuis. Rassurez-vous, nous nous efforcerons, pour notre part, de rester courtois pendant cette audition. La matière est telle que le choix ne doit pas être laissé à la seule appréciation des technostructures, mais doit être effectué à l'issue d'un débat à la fois large et serein. Une chose est sûre : que l'on soit pour ou contre la filière nucléaire, les déchets sont là, et il faut bien en faire quelque chose. Pour cette raison, je pensais que la question du traitement des déchets nucléaires était de celles qui susciteraient le moins de passion. De toute évidence, j'étais bien naïf.

Conformément aux dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958, je vais maintenant vous demander de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

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