À l'été 2013, après deux tentatives de réunion publique, il est clairement apparu que le débat ne pourrait pas avoir lieu dans des conditions normales et sereines, en tout cas sous cette forme. Le débat public consiste certes à diffuser de l'information, mais il permet surtout à la CNDP de faire remonter les opinions du public dont il effectue la synthèse. Pour recueillir ces opinions, à défaut de réunions publiques, nous ne disposions plus que de la voie de l'internet. L'instrument est évidemment utilisé par la CNDP depuis sa création, mais nous avons dû innover et programmer des débats contradictoires interactifs sur la toile. Grâce aux quelque dix mille connexions en direct ou en différé enregistrées, nous n'avons manqué ni d'arguments ni d'éléments d'information quand est venu le temps du bilan.
Une impression d'urgence excessive a marqué ce débat, enfermé dans un calendrier imposé par la loi de 2006 et lié à l'obligation de déposer la demande d'autorisation de création du centre de stockage au plus tard le 31 décembre 2014. Cette hâte, ne permettant pas de tenir compte du débat national en cours sur la transition énergétique, a conduit à négliger la demande de report formulée par plus de quarante associations. Elle n'est pas pour rien dans les difficultés que nous avons rencontrées.
Un autre enseignement tiré du débat est l'existence d'un clivage total entre ceux qui ne veulent à aucun prix du projet, et que personne ne pourra sans doute jamais convaincre, et ceux qui, intégrant la notion de risque calculé, envisagent d'avancer avec une extrême prudence. Si une dizaine de cahiers d'acteurs sur 150 restent neutres, les autres se partagent à égalité entre ces deux positions. Pourtant, alors que je ne suis pas parvenu à trouver la trace d'un compromis à l'issue du débat public classique, les dix-sept membres de la conférence de citoyens ont adopté une position à l'unanimité après qu'on leur a donné la formation et les moyens d'information indispensables. Ils ont non seulement compris le problème posé, mais ils se sont sentis investis de la mission de parvenir à un compromis. J'ai déjà présidé de nombreuses commissions de débat public, mais la conférence de citoyens a constitué pour moi une première dont l'excellent résultat me paraît particulièrement remarquable.