Intervention de Jean-Pierre Gorges

Réunion du 7 mai 2014 à 9h00
Commission d'enquête relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire, à la durée d'exploitation des réacteurs et à divers aspects économiques et financiers de la production et de la commercialisation de l'électricité nucléaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Gorges :

Je m'interroge sur l'opportunité d'un débat public sur un sujet de nature éminemment politique. D'abord, il est indéniable que nous avons des déchets nucléaires à traiter. Ensuite, on parle de transition énergétique sans savoir où l'on va, les choix dépendant d'un contexte politique fluctuant : aujourd'hui, la France semble pencher pour un recul du nucléaire alors que d'autres pays renoncent à cette option – même les Allemands se posent des questions. Sur ce sujet, j'espère que notre pays deviendra bientôt raisonnable.

Comme le rapporteur de notre commission d'enquête, je considère que la véritable facture du nucléaire doit intégrer les coûts de stockage. Je m'interroge toutefois sur l'impératif de réversibilité qui me paraît être la meilleure façon de barrer la route à un projet. Quand le charbon a été extrait des mines pour produire de l'énergie, la question de son retour dans les sols pour éviter qu'ils ne s'écroulent a-t-elle été posée comme elle l'est aujourd'hui pour le gaz de schiste ? Je crains que la réversibilité ne soit exigée pour le nucléaire que dans l'intention de rendre son usage impossible.

Alors que nous sommes très déterministes sur le sujet, nous l'ouvrons au débat public à des gens qui n'y connaissent rien. De la même manière, j'ai honte lorsque, à l'Assemblée, nous nous mêlons de matières que les experts et les techniciens que nous recevons maîtrisent pour y avoir travaillé des années durant. On ne peut pas, comme pour un jury d'assises, demander à des citoyens de donner un avis sur un sujet qui les dépasse. Qui est vraiment en mesure d'aborder ces sujets ? Autant il me semble légitime que cette conférence se prononce sur le choix du lieu d'implantation du projet et sur les modalités de son installation, autant la question de l'opportunité du projet relève, à mon sens, du politique.

Le débat public n'est-il pas un outil de communication qui permet à bon compte d'affirmer que les citoyens ont été consultés ? Chacun sait parfaitement que l'on peut faire dire ce que l'on veut à un panel de 10 000 personnes interrogées sur internet. Est-il sérieux de faire reposer les choix stratégiques de notre pays sur le débat public tel qu'il est aujourd'hui organisé ? Je fais de la politique depuis de nombreuses années, et je ne rencontre dans les réunions publiques quasiment que des citoyens qui contestent mon action ; cela ne m'empêche pas d'être réélu. Prenons garde à ne pas remettre en cause des choix structurants pour notre nation.

Le travail que vous avez mené porte sur les déchets ultimes dans un contexte de génération 3. Avez-vous prévu d'en faire autant pour la génération 4 et le changement de nature des déchets ?

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