Que pensez-vous du reproche de téléologie, souvent fait à la Cour ? On se souvient qu'un juge italien l'avait poussée à rendre des arrêts de principe, ou des arrêts de règlement, et, de fait, il y en a eu beaucoup, comme l'arrêt AETR. Quel est votre sentiment sur ce qu'on peut assimiler à un droit prétorien ?
Comment avez-vous perçu les arrêts de la Cour constitutionnelle allemande, du 30 juin 2008, relatif au traité de Lisbonne, ou celui du 15 juin 2012, relatif au MES, déclarant en substance que le dernier mot revenait au Bundestag parce que la norme suprême demeure la Constitution allemande ? C'est ce qui s'appelle remettre les pendules à l'heure, même si notre Conseil constitutionnel a indiqué, de son côté, que la Constitution – dans laquelle est intégré le droit communautaire – était la plus haute norme juridique.
La longueur des procédures, en particulier dans les contentieux touchant à la concurrence, pose de sérieux problèmes. De fait, le monde de l'économie n'est pas celui des juristes. Des délais de deux ou trois ans – surtout lorsque la Cour infirme des décisions de la Commission, comme dans l'affaire Schneider-Legrand – sont difficilement acceptables. Nous avions proposé que les décisions de la Commission, sans doute fondées en droit dans une certaine mesure – encore qu'une notion comme celle d'abus de position dominante soit assez subjective –, soient susceptibles d'appel devant le Conseil, afin qu'en dernier ressort la décision soit politique. Cela me semblerait mieux adapté à la gouvernance du monde économique.