Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le président du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, permettez-moi tout d’abord de vous remercier pour votre invitation, qui me donne l’occasion de vous exposer en quelques mots comment, en tant que président du GIFAS, le groupement des industries aéronautiques et spatiales, je vois la situation de la filière aéronautique française et son avenir. Nous sommes très sensibles à l’intérêt que porte la représentation nationale à l’industrie aéronautique, qui constitue un pôle d’excellence et un atout économique et social majeur pour notre pays.
L’industrie aéronautique et spatiale est un succès pour la France, c’est une filière solidaire très intégrée s’exprimant dans le cadre du GIFAS, qui regroupe aujourd’hui plus de 330 sociétés. Les succès d’Airbus, de Dassault et de SAFRAN, pour ne citer que les plus grands, c’est le succès de toute la filière, de la plus petite entreprise à la plus grande. Le GIFAS rassemble les maîtres d’oeuvre, les équipementiers et systémiers, ainsi que des PME, en une filière où les relations sont caractérisées par la solidarité et le dynamisme, une filière de haute technologie qui concerne tous les segments de l’activité aéronautique et spatiale – un cas de figure assez rare dans le monde –, qu’il s’agisse d’avions, d’hélicoptères, de moteurs, d’engins et de missiles, de satellites ou encore de lanceurs spatiaux – et cette énumération n’est pas exhaustive.
Le succès de notre secteur repose d’abord sur un partenariat solide et historique avec l’État, que l’on présente habituellement comme une implication de l’État au moyen des investissements effectués par celui-ci, mais que l’on pourrait également décrire comme un co-investissement permanent de l’État et des entreprises, qui permet d’anticiper les grandes décisions stratégiques. Les meilleures illustrations de cet aspect sont les décisions prises, l’une au début des années 2000 au sujet de l’A380, l’autre au milieu des années 2000 pour le lancement de l’A350.
La représentation du secteur aéronautique et spatial dans des structures créées et supervisées par l’État permet d’anticiper les grands enjeux d’avenir de notre industrie. Je citerai par exemple le CORAC – le Conseil pour l’aéronautique civile –, qui favorise des échanges et une démarche volontariste pour trouver les domaines de collaboration en matière d’aéronautique au sens large, puisque cela concerne aussi bien les avions eux-mêmes que le trafic aérien. Dans notre secteur d’activité, efficacité économique et efficacité environnementale vont de pair et constituent les principales préoccupations du CORAC. Créé plus récemment, en 2013, le COSPACE – Comité de concertation entre l’État et l’industrie – est, lui, spécifiquement dédié au secteur spatial.
Le succès du secteur repose également sur le fait que l’industrie aéronautique et spatiale est duale, c’est-à-dire qu’elle est à la fois civile et militaire, et porte les fruits de la fertilisation mutuelle de ces deux secteurs. Les apports allant dans le sens du civil vers le militaire – je pense notamment à l’utilisation à des fins militaires de composants trouvés sur le marché civil – sont ceux qui se font le plus rapidement, ce qui est assez logique dans la mesure où les développements réalisés dans le secteur militaire sont à haut risque On cite toujours l’exemple du GPS, application militaire arrivée vingt ans plus tard sur le marché civil ; si je devais faire une prédiction, je dirais que le vol autonome, c’est-à-dire impliquant moins de personnel : c’est tout l’enjeu des drones dans le domaine militaire.
Le GIFAS représente une profession dont le chiffre d’affaires a été de 48 milliards d’euros pour l’année 2013, dans le contexte d’un trafic aérien mondial en croissance. Plus de 80 % de la production de cette industrie sont exportés alors que plus de 70 % de ses effectifs sont en France : il s’agit donc d’exportation réelle puisque l’on fabrique en France pour vendre hors de France. Chaque année, plus de 14 % du chiffre d’affaires sont consacrés à la recherche et au développement, ce qui permet des retombées technologiques dans de nombreux secteurs industriels et de nombreux territoires.
Le secteur emploie 177 000 hommes et femmes, avec une évolution extrêmement dynamique des effectifs, en croissance de 3,5 % en 2013, soit 6 000 emplois nets créés, ce qui porte le solde net sur trois ans à plus de 20 000 emplois nets. Du fait des remplacements auxquels il faut procéder, ce sont en fait plus de 40 000 recrutements qui ont été enregistrés, ce qui témoigne de la vitalité et de l’attractivité du secteur. En 2013, les embauches ont concerné pour 42 % des ingénieurs, pour 20 % des techniciens et pour 30 % des ouvriers qualifiés. Il convient également de signaler un effort de la profession au bénéfice de l’apprentissage et de la formation en alternance, avec plus de 6 000 jeunes apprentis en 2013.
Pour 2014, en dépit d’un léger ralentissement de la dynamique, la filière aéronautique française devrait rester un secteur créateur net d’emplois.
Pour terminer sur ce point, je rappellerai que notre industrie investit chaque année un milliard d’euros dans l’appareil de production – sans parler du secteur recherche et développement, que j’ai évoqué. C’est là un succès, certes, mais qu’il faut veiller à préserver et amplifier face aux énormes défis de la compétitivité, de la concurrence et de la mondialisation.
Renforcer notre compétitivité, c’est prendre les mesures qui s’imposent dans un monde où nos concurrents bénéficient d’aides considérables de leurs États. À titre d’exemple, aux États-Unis, nos concurrents – nos « meilleurs amis » – de chez Boeing dont le dernier programme, le 777X, concurrent de l’A380 et de l’A350, bénéficie de 8,7 milliards de dollars de subventions sous forme d’aides fiscales, au mépris de toutes les règles du commerce international. Bien que les pouvoirs publics aient pris conscience des enjeux de compétitivité en adoptant bon nombre de mesures incitatives, nous attendons avec impatience de voir ce que le Pacte de responsabilité va permettre en termes d’amélioration de notre capacité à produire en France et exporter hors de France.
Je ne serais pas complet si j’omettais d’évoquer la question monétaire. Notre industrie produit en euros et vend en dollars. Nous avons réussi jusqu’à présent à contrecarrer cet effet, en payant très cher des couvertures financières contre le différentiel monétaire. Selon nos estimations, une hausse de 10 centimes de l’euro a pour conséquence une perte moyenne pour la profession de 2 % de marge sur le chiffre d’affaires.
La concurrence est de plus en plus forte, et ne vient plus seulement des États-Unis, mais aussi d’autres pays tels que le Canada, ou de pays émergents comme la Chine ou le Brésil, pour ne citer qu’eux. Le duopole Boeing-Airbus qui a caractérisé le marché depuis les années 1980 est derrière nous, ce qui nous oblige à investir dans l’innovation si nous voulons rester devant – ce qui passe par un soutien à la R