Nous avons le plaisir d'accueillir, pour cette table ronde consacrée à la taxe sur les transactions financières (TTF), organisée conjointement par la Commission des affaires européennes et la Commission des finances, des représentants de toutes les parties concernées : l'administration européenne, le gouvernement français, les institutions financières, le monde de la recherche et celui des associations. Nous les remercions d'avoir répondu à notre invitation.
Il s'agit de M. Manfred Bergmann, directeur général de la fiscalité et de l'union douanière à la Commission européenne, l'un des pères du projet de taxe discuté au sein de l'Union ; de Mme Claire Waysand, première femme à occuper la fonction de directrice de cabinet du ministre des finances – et je ne peux que me réjouir de ce progrès vers la parité ; de M. Gilles Briatta, secrétaire général adjoint à la Société Générale et représentant de la Fédération bancaire française ( FBF ), mais qui a précédemment occupé la fonction de secrétaire général des affaires européennes ( SGAE ) ; de M. Alexandre Naulot, chargé de plaidoyer sur les questions de financement du développement à Oxfam France, ONG qui lutte contre la pauvreté et l'injustice dans le monde ; et de M. Alain Trannoy, professeur à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS) et à l'Aix-Marseille School of Economics ( AMSE ), spécialiste de l'économie des inégalités et de la redistribution des revenus, et membre du Conseil d'analyse économique ( CAE ).
Nous souhaitons précisément débattre ici du projet de taxe sur les transactions financières de la Commission européenne, projet qui se présente sous la forme d'une coopération renforcée de onze États membres – l' Allemagne, l' Autriche, la Belgique, l' Espagne, l' Estonie, la France, la Grèce, l' Italie, le Portugal, la Slovaquie et la Slovénie. Ce projet est le lointain héritier d'un autre, visant à appliquer à l'échelle de l'Europe la taxe Tobin, que M. Harlem Désir et moi-même avions défendu au Parlement européen avant qu'un vote négatif – acquis par seulement sept voix de majorité – ne l'enterre. La reprise de ce dessein a pris du retard, principalement en raison des effets délétères de la crise financière de 2008, si bien que j'ai l'impression de me retrouver en face d'un serpent de mer. Espérons que celui-ci « sorte de la mer », pour reprendre l'expression de M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics.
Le document de présentation élaboré par la Commission européenne précise les objectifs de ce projet de coopération renforcée : « harmoniser les législations relatives à fiscalité indirecte des transactions financières » et « faire en sorte que les établissements financiers contribuent de manière équitable et substantielle à la couverture du coût de la récente crise » – en quelque sorte leur demander de « renvoyer l'ascenseur » aux États qui, au risque d'aggraver leurs difficultés financières, les ont soutenus alors qu'ils étaient responsables du déclenchement de cette crise.
Nous souhaiterions connaître l'état des dernières discussions au sein de l'Union, ainsi que les évolutions intervenues entre la proposition initiale du 28 septembre 2011 et la décision de mise en oeuvre d'une coopération renforcée prise le 14 février 2013. Un arrêt récent de la Cour de justice de l' Union européenne ( CJUE ) a rejeté le recours britannique visant à annuler la coopération renforcée, ce qui écarte tout risque de contentieux. Néanmoins, les débats de fond demeurent et nos échanges devraient donc nous permettre de connaître les points de vue des défenseurs comme des détracteurs de la taxe et leurs arguments respectifs, qu'ils soient fondés sur un souci de justice sociale ou d'efficacité économique ou, dans le meilleur des cas, sur une conjonction de ces deux préoccupations. Il nous faudra également aborder la question de l'affectation du produit de la taxe, qui, pour le moment, n'est toujours pas tranchée.