Intervention de Alain Vidalies

Réunion du 27 mai 2014 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Vidalies :

Au fur et à mesure que la discussion avance, on note les contradictions de l'opposition par rapport au choix qui avait été fait d'un angle d'attaque politicien, probablement destiné à l'extérieur.

Le débat n'est pourtant pas nouveau. Il avait déjà eu lieu, en commission, dans l'hémicycle et dans l'ensemble du Parlement, et visait à répondre à ces questions fondamentales que sont l'efficacité de la peine et la lutte contre la récidive.

Si j'interviens alors que je ne l'avais pas prévu, c'est que j'ai lu dans l'exposé des motifs de l'amendement CL 103, visant à la suppression de l'article 1er, cette phrase incroyable : « Cet article doit être supprimé parce qu'il est symptomatique de l'idéologie qui sous-tend ce texte : il ne s'agit plus de juger les faits, mais de juger les individus. » Vous rendez-vous compte du niveau de régression de la pensée collective que cela révèle ?

Or, hormis M. Fenech – dont je constate la cohérence –, les signataires de cet amendement ont dit exactement l'inverse durant leurs interventions. Si M. Gosselin estime que nous sommes tous attachés au principe de l'individualisation des peines, pourquoi fait-il dans le cadre de cet amendement un aussi mauvais procès au texte ? En quoi y a-t-il une rupture par rapport au débat sur le projet de loi pénitentiaire ? Il serait instructif de regarder ce que chacun avait déclaré à l'époque !

Si ma démonstration ne vous convainc pas, sachez que le sénateur Jean-René Lecerf, l'un des meilleurs spécialistes de ces questions à l'UMP, a fait dans une interview à Libération des déclarations que nous n'aurions jamais osé faire : il dit que ce projet de loi est dans la continuité de la loi pénitentiaire et que le présenter comme laxiste est « de la folie furieuse ». Admettez que nous avons été plus modérés que lui !

Le fond de l'affaire, c'est que votre fantasmagorie de la gauche vous conduit à présenter ce texte comme l'expression d'un supposé laxisme qui ignorerait les exigences de la République en matière de répression et de protection des victimes, alors qu'il ne vise qu'à l'efficacité.

Ce qui est en jeu, comme l'a bien rappelé le rapporteur, c'est l'échec d'une politique – dont la responsabilité ne vous incombe pas plus qu'à nous. Pourquoi ne réussit-on pas à obtenir plus de cohérence, voire plus de cohésion entre la justice, la police et l'administration pénitentiaire ? Au lieu de chercher à donner des réponses sensées à cette question, nous nous engageons dans un débat incohérent, qui n'a rien à voir avec le texte. Voyez Philippe Houillon, qui fait une démonstration sur le fait que le texte aboutira à traiter les récidivistes comme les autres délinquants, alors que c'est exactement le contraire !

Ayez une lecture claire du texte et cessez de dire qu'il porte un message anti-carcéral. Personne ici ne propose de fermer des prisons ! En revanche, nul n'ignore que l'emprisonnement peut avoir des effets néfastes sur certains individus, qu'il peut être un facteur criminogène, et qu'il faut de ce fait mettre en place un suivi des personnes emprisonnées.

Par ailleurs, l'administration pénitentiaire aimerait bien ne pas avoir à gérer ce que la société ne sait pas traiter, notamment des malades. Pourquoi ne pas en parler ? On ne met pas en prison des gens seulement pour purger une peine, sans même leur procurer de suivi – qui plus est s'ils sont malades ! Pourquoi ignorer cette réalité ? N'est-ce pas un problème pour tous les humanistes, de droite comme de gauche, que 30 % des personnes incarcérées ne réussissent pas le test de lecture ? Cela ne marque-t-il pas l'échec d'une éducation ? Autant de questions qui ne sont pas spécifiquement de gauche !

Pour y répondre, nous voulons une loi qui vise à l'efficacité. Je pense que vous faites fausse route en faisant de ce texte ce qu'il n'est pas, alors que les Français attendent un véritable débat républicain.

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