Intervention de Éric Jalton

Séance en hémicycle du 7 novembre 2012 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2013 — Outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Jalton :

Monsieur le président, merci d'être des nôtres de nouveau, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, au cours de la législature écoulée, j'ai souvent été très critique envers les gouvernements précédents tant je constatais, consterné, que l'ambition politique pour les outre-mer ne trouvait pas sa traduction dans les chiffrages budgétaires soumis à notre approbation.

Nous étions dans l'ère de l'ultralibéralisme décomplexé, voire débridé, où nos gouvernants nationaux avaient choisi nettement leur camp, celui de l'aide aux plus favorisés, creusant ainsi le déficit budgétaire national, apparemment seule solution à tous nos maux.

Les outre-mer, et singulièrement l'archipel des îles de Guadeloupe, n'ont pas échappé à la loi d'airain de l'ultralibéralisme, dont l'application a adressé un signal de désespérance aussi bien à la majorité de nos concitoyens ultramarins, souvent de condition modeste, qu'aux investisseurs. Cela était dû, d'une part, à une instabilité dans les dispositifs incitatifs tels que la défiscalisation, sous le coup d'injonctions paradoxales, notamment pour la filière du photovoltaïque ; d'autre part, à une mise à mal ciblée des dispositifs sociaux en faveur des plus défavorisés.

Cette politique permanente a conduit en 2009 à une explosion sociale contre la profitation, dont les scories éclairent encore l'avenir des ultramarins d'une lumière bien sombre. Les gouvernants montraient ainsi leur désamour des ultramarins, et les populations leur révolte, parfois de façon ouverte et bruyante, le plus souvent – ce qui est autrement plus préoccupant – dans le silence du désespoir, recherchant le rêve dans ces dérivatifs que sont l'alcool, la drogue, le loto, le PMU et autres miroirs aux illusions perdues, qui déconstruisent les âmes et violentent les consciences.

C'est dire, monsieur le ministre, mes chers collègues, si l'alternance de mai et juin 2012 a suscité 1'espérance d'un changement de paradigme dans les rapports entre la France continentale et la France ultramarine. C'est là, je crois – j'en suis sûr –, une volonté que nous défendons tous, nous les députés progressistes de la Nation. En effet, il faut désormais changer un certain regard, qui a prévalu ici aussi, parfois même sur tous les bancs de cette assemblée, un regard qui nous a vus, et nous voit encore comme des gens qui coûtent cher à la France. Il faut changer de regard pour nous ancrer résolument dans une vision géopolitique permettant à la France, dans son acception territoriale ultramarine, d'être un ensemble politique et géographique où jamais le soleil ne se couche, de posséder une vaste biodiversité – située à 80 % outre-mer –, de disposer du deuxième ou troisième domaine maritime mondial, de concurrencer Cap Canaveral depuis la base de Kourou en Guyane, et de présenter une diversité ethnique et culturelle unique au monde.

Il faut changer de regard, mais aussi avoir une visibilité dans les arts et métiers, la culture et le sport, constructeurs de la pensée moderne et postmoderne, que la France réduite à sa dimension hexagonale n'aurait jamais eue autrement.

Tout cela mérite bien un nouveau regard, monsieur le ministre, et aujourd'hui un nouveau budget. Je considère, pour ma part, que ce budget en augmentation significative concrétise la réalisation des trente engagements spécifiques pour les outre-mer pris par François Hollande, Président de la République, mis en oeuvre par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, et par vous, Victorin Lurel, ministre des outre-mer volontaire et engagé.

Autant de signaux qui montrent que, par ces lignes, par la mise en place des emplois d'avenir, du contrat de génération, par l'arrêt de la suppression massive et irréfléchie de postes dans la fonction publique, par la création de la Banque publique d'investissement, le changement, qui peut paraître long à venir au regard de 1'urgence sociale, commence en s'inscrivant dans ce projet de budget avec l'affirmation d'une volonté politique forte, faisant de la régulation et de la concertation les principes de ce nouveau contrat social démocratiquement approuvé dans les outre-mer par une large majorité de nos concitoyens en mai et juin derniers.

En attendant, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voterai solidairement en faveur de ce budget, tout en demeurant vigilant et exigeant sur l'essentiel, à savoir la mise en activité des jeunes, le soutien au développement et à la diversification économiques, la sécurité civile et sanitaire – je pense à ce qui se passe actuellement à l'hôpital de Marie-Galante –, la justice sociale et l'équité territoriale, le logement digne, la protection et la valorisation de notre environnement, la lutte contre toutes les formes de discrimination.

Pour conclure, monsieur le ministre, au-delà de ce budget et des trente engagements présidentiels, je continuerai pour ma part à vous solliciter, aussi bien que l'ensemble du Gouvernement, sur certains dossiers qui me tiennent à coeur et défraient parfois la chronique locale – je le ferai toutefois dans un autre cadre, notamment pour plus d'efficacité. Je vous remercie de m'avoir écouté. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, GDR et UDI.)

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