Le système éducatif français est en difficulté, et même en panne : c'est ce que révèle l'enquête de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la fameuse enquête du Programme international pour le suivi des acquis des élèves, dite « PISA ». Cette étude montre que, dans le domaine de la compréhension de l'écrit, des mathématiques et des sciences, le niveau de la France est moyen, voire faible. Mais ce qui nous a le plus marqués, le plus choqués, nous, Français, tellement sûrs de notre école républicaine, une école que l'on veut porteuse d'espoir pour les jeunes générations, c'est que celle-ci est devenue socialement très inégalitaire, au point de compromettre, à terme, notre pacte républicain. Au-delà de la question sociale, on constate aussi que l'école reste insuffisamment adaptée au profil de chaque enfant.
Ces constats, c'est vrai, sont douloureux ; mais ils doivent agir comme un stimulant. Sur ce sujet au moins, dans ces moments troubles, la nation, j'en suis persuadé, peut se rassembler. La majorité a pris ses responsabilités en matière de refondation de l'école, dégageant de nouveaux moyens budgétaires, à des niveaux très élevés. Cette politique diffère assurément de celle conduite sous l'ancienne majorité.
Un enseignement de qualité requiert des moyens ; et peut-être en faudrait-il encore davantage ; mais il faut aussi repenser les contenus à transmettre à nos jeunes, ainsi que nos méthodes pédagogiques. C'est l'objectif de la loi d'orientation et du CSP.
Nous voulons créer les conditions d'une méthode nouvelle, afin que les évolutions des programmes se fassent dans la sérénité et au plus près des attentes de notre jeunesse et d'une société qui évolue si vite. Aujourd'hui, les enseignants comme les parents le disent, le contenu des enseignements pose problème. Les programmes scolaires sont trop chargés, trop théoriques ; ils incitent trop les professeurs à se soumettre au dogme de la note qui sanctionne l'échec au lieu d'encourager la bonne volonté. Cette forme d'évaluation génère de l'angoisse et ne favorise pas la confiance en soi.
Il faut remédier à cette situation. Pour ma part, je suis satisfait des premières orientations de vos travaux. En matière de contenus pédagogiques, la qualité doit assurément primer sur la quantité et, en matière d'élaboration des programmes, l'approche progressive doit prévaloir sur le chamboulement périodique. Si vous avez raison de dire que « le travail sur les programmes ne dépend pas d'un ministre ou d'une majorité » et qu'il doit s'inscrire dans la durée, ce travail doit aussi se faire dans la concertation la plus large, en associant l'ensemble de la communauté éducative et le peuple, car c'est de la jeunesse qu'il s'agit. L'école doit ouvrir ses portes et ses fenêtres pour rassembler notre peuple.
De ce point de vue, des formes nouvelles de concertation sur les programmes sont à mettre en place, au plus près du terrain, pour recueillir les opinions des familles et des enseignants. Cette démarche me paraît indispensable pour mobiliser les familles et renforcer le lien entre l'école et la nation. Quel est votre sentiment à ce sujet ?
En outre, si les programmes doivent évoluer régulièrement, il faut aussi que les enseignants y soient bien préparés. La formation continue des professionnels est une donnée majeure pour réussir l'école de demain et, en ce domaine, la France est en retard. Vous qui avez été enseignant et recteur d'académie, vous le savez, monsieur le président : agir dans ce domaine sera une marque de reconnaissance pour les enseignants, qui en ont bien besoin.
Enfin, le fait que la réforme des rythmes scolaires ait exclu la réflexion sur les programmes a sans doute largement contribué à son incompréhension : il me paraît urgent de rapprocher ces deux chantiers pour une plus grande lisibilité et une meilleure efficacité. Dans cette optique, il faudra aussi concevoir un nouveau partenariat à vocation pédagogique entre l'éducation nationale et les communes, dont le temps périscolaire est accru, en quantité et en qualité. Si les enseignements, dans leur contenu, restent bien entendu de la responsabilité de l'État, le rôle des collectivités territoriales ne peut se résumer à celui d'un tiroir-caisse dans lequel l'État vient « piocher » pour mener à bien ses réformes, si indispensables soient-elles.