Je formulerai tout d'abord une observation de méthode : je comprends les raisons pour lesquelles nous ne disposons des épais documents que vous venez de nous présenter qu'au moment de votre audition, mais vous conviendrez que cela nous empêche de vous poser toutes les questions nécessaires. Je ferai la même remarque s'agissant de l'avis du Haut Conseil des finances publiques qui nous sera présenté tout à l'heure et que nous découvrons à l'instant : une telle méthode de travail est quelque peu frustrante, à moins d'avoir le don d'omniscience !
Cela étant dit, je salue la qualité des travaux de la Cour des comptes, tant en ce qui concerne la certification des comptes de l'État que l'exécution budgétaire. Sur la certification, le travail réalisé depuis huit ans porte manifestement ses fruits, compte tenu du nombre important de réserves qui ont pu être levées, en totalité ou en partie, au cours de cette période. À un moment où la confiance se perd et où les débats publics s'intensifient, cet effort, d'ailleurs à poursuivre, contribue à la modernisation de l'État. Mais une fois les comptes de l'État certifiés sincères et fiables, et une fois notre administration modernisée, en quoi la certification permet-elle d'améliorer le pilotage des finances publiques ? Quels progrès conviendrait-il d'accomplir, non pas tant pour mieux tenir ces comptes que pour mieux les gérer ? Sachant que notre Commission a un devoir de vigilance absolue à l'égard de la situation de nos finances publiques, ceux qui s'interrogent sur le rôle du Parlement doivent sans doute se dire qu'il a failli dans sa mission de contrôle, étant donné la dérive constatée depuis dix ans en la matière.
Pour terminer, je formulerai plusieurs constats. Tout d'abord, le redressement de nos finances publiques est réel puisque nous avons réussi en deux ans à effacer la dégradation du déficit structurel générée par le précédent Gouvernement – et non par la seule crise financière – pour ramener ce déficit à un niveau proche de celui de 2002. Ensuite, c'est la première fois que l'on enregistre un niveau aussi faible d'évolution des dépenses de l'État, de sorte que c'est plutôt le financement de la protection sociale qui pose aujourd'hui problème. La Cour des comptes semblant cependant indiquer, s'agissant du budget de l'État, que l'effort structurel demeure insuffisant, reste à savoir quel est le bon rythme de réduction de la dépense publique. Sans doute pourrez-vous nous répondre sur ce point, compte tenu du précédent avis du Haut Conseil des finances publiques sur lequel d'aucuns s'étaient appuyés pour insister sur l'effet récessif qu'aurait une maîtrise trop vigoureuse des dépenses publiques – à quoi vous aviez rétorqué que, sans aucune maîtrise, la situation serait pire encore. À cet égard, il conviendrait sans doute de mieux appréhender l'évolution des recettes à moyen terme : en effet, lorsque vous constatez que seulement 15 des 30 milliards d'euros de recettes supplémentaires prévues ont été perçus, cela accrédite l'idée que « trop d'impôt tue l'impôt ». Comment analyser un tel écart en termes de réalités macroéconomiques – c'est-à-dire d'évolution des revenus, de résultat des entreprises et de consommation ? Il apparaît en tout cas certain que l'ajustement ne peut plus, ne doit plus se faire par les recettes. Or, si l'on peut se satisfaire des bons résultats de l'exécution 2013 par rapport à celles des années précédentes, la maîtrise des dépenses publiques y demeure fragile dans la mesure où elle repose sur deux facteurs conjoncturels : une moindre inflation, d'une part, et une moindre charge d'intérêts, d'autre part. Un effort accru s'impose donc en ce domaine lors des prochaines lois de finances et de financement de la sécurité sociale.