…président de l’ACJF, l’Action catholique de la jeunesse française, et Pierre-Henri Teitgen, résistant, membre du MRP, le Mouvement républicain populaire, comme l’abbé Pierre. Ces deux grands gardes des sceaux ont accepté d’inscrire leur action sous l’inspiration de la défense sociale nouvelle, dont la déclaration de principe proclamait que la peine de privation de liberté a pour but essentiel l’amendement et le reclassement social du condamné.
Quant à la gauche républicaine, évidemment, elle s’est toujours réclamée de cet héritage humaniste, avec le code pénal de 1791, tout d’abord, qui est issu de la philosophie des Lumières, mais aussi de l’ambition démocratique de 1789, selon laquelle l’éducation et le travail amendent l’individu et la justice est rendue au peuple.
Des années 1875 à 1885, ensuite, la gauche républicaine a refusé les lois d’exclusion, contraires aux valeurs de la République. Retenons la figure emblématique de Georges Clemenceau, qui incitait le gouvernement d’alors à engager une réforme pénale, qui s’est opposé aux lois de relégation dans les bagnes coloniaux, à la relégation des multirécidivistes en soutenant que toute pénalité qui n’aboutit pas à l’amendement du coupable est insuffisante comme mesure de préservation sociale.
Enfin, je vous parlais de la défense sociale nouvelle, animée par de très belles figures, comme Marc Ancel, magistrat, président de chambre à la Cour de cassation, Paul Amor, résistant, magistrat, procureur, directeur de l’administration pénitentiaire, Jean Chazal, qui était juge des enfants, Pierre Cannat, magistrat, contrôleur général des services pénitentiaires. Bien entendu, c’est dans cette tradition humaniste que se sont inscrits les grands gardes des sceaux : Robert Badinter, Élizabeth Guigou, Henri Nallet, Michel Vauzelle.
Cela n’a pas empêché que l’on décide, lorsque c’était nécessaire, de l’aggravation des peines punissant les délits et les crimes. Mais la dignité doit rester au coeur de la pénalité : la dignité des personnels, qui doivent pouvoir exercer leur mission de surveillance ou de suivi dans des conditions correctes et de manière efficace ; la dignité de la victime, à qui l’État doit protection et une part de la réparation ; la dignité du condamné, qui doit pouvoir réintégrer le corps social. Et cette dignité-là est inscrite dans une peine tournée vers l’avenir, pour la victime, pour la société, pour l’auteur des faits. Platon lui-même disait déjà que celui qui punit judicieusement punit en vue de l’avenir, de façon que le coupable ne retombe pas dans l’injustice.
Mesdames, messieurs les députés, voilà ce qu’attendent les Français.