mais vous faites fausse route. En la matière, il faut en finir avec les contre-vérités assénées : une contre-vérité répétée ne devient jamais une vérité. Il faut en finir avec la fameuse fable du « tout carcéral » dans lequel aurait sombré notre pays.
Quelques chiffres pour démonter votre analyse, qui ne correspond en rien à la réalité. Les dernières statistiques pénales du Conseil de l’Europe, les études Space I et Space II, que vous connaissez, madame la garde des sceaux, ont été publiées il y a quelques jours. Elles montrent que la France a un taux de détention de 117 détenus pour 100 000 habitants, ce qui la situe très largement en dessous de la moyenne des pays du Conseil de l’Europe, qui est de 150 détenus pour 100 000 habitants.
Le chiffre est encore plus probant quand on retire à ces 117 détenus le nombre de personnes non écrouées, c’est-à-dire celles qui bénéficient d’un placement sous surveillance électronique. Il y en avait, au moment de ces statistiques, c’est-à-dire en 2013, environ 10 000 ; on a aujourd’hui dépassé ce nombre, déjà très important et qui ne permet pas aux services de l’administration de suivre : les couacs se multiplient sur la surveillance des PSE. Si l’on retire le nombre de ces personnes, la France arrive, avec un taux de 102 détenus pour 100 000 habitants, à la trente-troisième position des pays du Conseil de l’Europe en matière de taux d’incarcération, parmi les derniers pays ! On est très loin de cette image d’un pays prisonnier d’une approche particulièrement carcérale.
Je voudrais comparer avec d’autres pays. Vous nous citez, et vous ne manquerez pas de le faire dans ce débat, l’exemple du Canada. Le Canada est à bien des égards un modèle en matière d’application d’une politique pénale ferme et juste. Le taux de détention y est de 118 détenus pour 100 000 habitants : nous sommes à 102 en France. Là aussi, nous administrons la démonstration que vous faites fausse route.
Plus intéressant encore, dans ces mêmes études Space, la France, en matière de surpopulation carcérale, se situe parmi les plus mauvais élèves du Conseil de l’Europe. Le taux était de 122 détenus pour cent places de prison en juillet 2007.