Intervention de Thierry Mariani

Séance en hémicycle du 3 juin 2014 à 21h30
Prévention de la récidive et individualisation des peines — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThierry Mariani :

Les Français seront les premières victimes de cette posture idéologique. En effet, les délinquants comprendront qu’ils ont encore moins de chances d’aller en prison. Dès lors, il y a tout lieu de penser que cela ne fera absolument pas reculer la délinquance. En réalité, il s’agit de réduire la fermeté de la justice contre la petite délinquance.

Par ailleurs, le texte supprime les peines plancher. Là aussi, on retrouve le présupposé idéologique qui a guidé le début de la législature, à savoir qu’il fallait supprimer dans tous les domaines ce qu’avait mis en place la majorité de Nicolas Sarkozy.

En l’espèce, cette disposition est pour le moins surprenante, puisque, selon un sondage CSA paru en février 2014, 77 % des Français souhaitent le maintien ou le renforcement des peines plancher. C’est dire que l’opinion publique comprenait leur nécessité.

Le signal d’impunité adressé aux délinquants est très clair. D’ailleurs, madame la garde des sceaux, vous n’avez pas attendu ce débat pour demander aux juges de ne plus appliquer les peines. Une fois de plus, je regrette que le Gouvernement revienne systématiquement sur les mesures prises par Nicolas Sarkozy.

Ce projet de loi vise également à créer une mesure appelée contrainte pénale, qui constituera une peine à part entière, en milieu ouvert. Cette mesure pourra être prononcée par le juge, selon son appréciation de la personnalité de l’auteur.

Initialement, il était prévu que ce dispositif s’applique à des délits passibles de cinq ans de prison au maximum. En commission, tous les délits passibles au maximum de dix ans de prison sont entrés dans le champ de la contrainte pénale, ce qui est révélateur du laxisme d’une partie de votre majorité.

Par ailleurs, des incertitudes persistent sur le dispositif. Tout d’abord, sur la durée de la peine de contrainte pénale, qui ira de six mois à cinq ans ; tout dépendra de l’appréciation du tribunal. Ensuite, sur le contenu de la peine, car les obligations et interdictions dépendent entièrement du contexte, en l’occurrence de la personnalité de l’auteur, de la nature de l’infraction, ou encore de la victime.

Par conséquent, le contenu de la peine est totalement incertain, non seulement avant le prononcé de la peine, mais aussi pendant son exécution, puisqu’il appartient au juge d’application des peines de procéder à toute modification qu’il jugerait utile. Cette mesure est donc en contradiction manifeste avec le principe de légalité des peines.

Enfin, une dernière mesure est caractéristique de l’idéologie dont vous faites preuve : il est prévu que soit systématiquement étudiée, aux deux tiers de la peine, la possibilité d’une mesure de sortie encadrée. Dans la mesure où les crédits de réduction de peine automatiques ne sont pas supprimés, le mécanisme d’examen automatique aura lieu, non pas aux deux tiers, mais à la moitié de la peine prononcée.

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