Intervention de Nicolas Dupont-Aignan

Séance en hémicycle du 3 juin 2014 à 21h30
Prévention de la récidive et individualisation des peines — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Dupont-Aignan :

Je ne vous demande pas de m’admirer mais d’écouter un parlementaire comme un autre.

Oui, les Français n’en peuvent plus de l’impuissance de l’État régalien, de votre mépris à l’égard de la représentation nationale, par ailleurs. Oui, l’impunité qui règne dans notre pays est le produit de l’immense laxisme qui imprègne depuis tant d’années les milieux judiciaires français, un laxisme conforté par des lois successives qui ont sans cesse favorisé les alternatives à la prison, sans comprendre qu’elles lui faisaient perdre son caractère dissuasif et protecteur. Contrairement d’ailleurs à l’image que vous voulez donner du précédent quinquennat, il n’a pas été celui de la fermeté ; des lois positives ont certes été votées, mais de manière contradictoire. La loi Dati a ouvert un champ trop large aux peines alternatives.

Loin de tirer les conséquences des échecs passés, vous voulez démanteler ce qui avait été fait de bien, les peines plancher, et, avec la contrainte pénale, aller encore plus loin dans la casse de l’État régalien. L’incarcération va en effet devenir l’exception, les conséquences en seront dramatiques, et l’impunité, puis l’insécurité, exploseront.

Je ne peux m’empêcher de penser aux habitants d’un quartier que je voyais ce week-end, dans ma circonscription, qui ne comprennent pas pourquoi un trafiquant de drogue deale à domicile en portant un bracelet électronique qui n’est pas surveillé. Des exemples comme ça, il y en a des centaines dans notre pays, fruit du laxisme judiciaire, et ils alimentent la colère de nos concitoyens.

En vérité, le système judiciaire français est débordé et le sera plus encore après votre réforme, car il manque des places de prison nécessaires et de l’accompagnement correct pendant et après la détention : 57 000 places en France contre 96 000 au Royaume-Uni, je ne reviendrai pas sur les statistiques, nous les avons assez entendues aujourd’hui. Voilà, tout simplement, l’explication. Seul un système pénitentiaire adapté et humain peut éviter la circulation dans nos rues de délinquants dont la place est en prison. Oui, vous allez libérer entre 10 000 et 20 000 délinquants, qui circuleront dans nos rues et aggraveront la délinquance. Les Français pourront savoir qui a été responsable de cela : votre majorité et ce projet de loi.

Il convient de se donner les moyens de reconstruire l’État, plutôt que d’inventer un suivi personnalisé d’assistante sociale impossible à mettre en oeuvre correctement. Nos forces de police et de gendarmerie sont écoeurées, madame la garde des sceaux, de l’attitude du milieu judiciaire et de vos encouragements au laxisme. Les surveillants pénitentiaires vivent un enfer quotidien et ne sont pas soutenus par votre ministère. Nos concitoyens hésitent de plus en plus entre subir et se faire justice eux-mêmes. La France n’a pas besoin, aujourd’hui, d’une amnistie déguisée. Vous porterez une responsabilité immense dans la situation d’insécurité, et les Français se rappelleront à votre souvenir.

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