Monsieur le président, je vais répondre à la fois à M. Fenech et à M. Ciotti.
Monsieur Fenech, le mot « victime » figure à l’article 1er, votre demande est donc satisfaite. Nous ne voulons pas introduire ce terme à l’article 2 parce qu’il n’est pas possible de considérer que la peine peut varier en fonction de la situation de la victime. Cela nécessiterait d’ailleurs une explication. Si la vulnérabilité et la fragilité de la victime doivent être prises en considération, ce sont des circonstances objectives de la commission de l’infraction. Si quelqu’un profite de la faiblesse d’une victime pour la voler ou pour l’escroquer, il commet forcément une infraction beaucoup plus grave. Ceux qui font du porte-à-porte en vendant des pommes à des personnes âgées en essayant de leur faire parler de leurs souvenirs pour qu’ils en arrivent à parler en anciens francs, et qui finissent par leur vendre dix kilos de pommes pour 2 000 euros, ceux-là sont assez lourdement sanctionnés parce que c’est une escroquerie, d’ailleurs un peu répandue. Et ce type d’escroquerie tient compte de la vulnérabilité de la victime, et la peine prononcée prend cela en considération.
La demande que vous formulez est, à mon avis, parfaitement légitime, mais elle est d’ores et déjà satisfaite dans la loi. Si nous pouvions vous faire plaisir et mettre fin à ces débats interminables sur la question de la victime en inscrivant ce terme dans le texte, nous le ferions. Mais la difficulté est que si nous inscrivons le mot « victime » dans le texte, nous laisserions place à l’interprétation selon laquelle la victime, pour une réparation symbolique du trouble que l’infraction lui a causé, pourrait essayer de pousser la peine à la hausse. C’est ce que nous ne voulons pas, et Alain Tourret a appelé votre attention sur ce point tout à l’heure. C’est la raison pour laquelle nous nous opposons à l’introduction de la mention à la situation de la victime à l’article 2.
Quant à la question de la surindividualisation par la mention de la situation matérielle, j’observe que ce sont des termes usuellement utilisés dans le code de procédure pénale. Ils ont été introduits à l’article 41 par une loi du 27 mars 2012 qui, sauf erreur de ma part, était la loi de programmation des places d’emprisonnement. La loi prévoit qu’il faut vérifier la situation matérielle, familiale et sociale d’une personne faisant l’objet d’une enquête et l’informer des mesures propres à favoriser l’insertion sociale de l’intéressé.
Il s’agit d’un vocabulaire assez proche, et je ne vois pas comment vous essayez de créer une divergence entre les termes que nous employons et ceux que vous avez employés lorsque vous étiez majoritaires et que vous aviez voté cette loi du 27 mars 2012. Il s’agit de divergences qui n’existent pas.