Ces deux amendements, ainsi que l'amendement CL6, tendent à supprimer tout ou partie de l'article.
Le 1° étend l'obligation faite aux hébergeurs et fournisseurs d'accès à internet (FAI) de mettre en place des dispositifs de signalement des contenus illicites ayant trait au terrorisme. Il ne vise pas à interdire ces contenus, mais seulement à instaurer une obligation spécifique aux FAI et hébergeurs, permettant dès lors d'engager leur responsabilité civile et pénale. Nous avons abordé ce sujet, je l'ai dit, à l'occasion d'autres débats, dont celui sur le texte visant à pénaliser les clients de personnes prostituées.
Je conviens, monsieur le rapporteur, que l'obligation du recours au juge judiciaire n'est pas un principe constitutionnel, mais je rappelle que le Conseil constitutionnel a déjà noté « la difficulté fréquente d'apprécier la licéité d'un contenu » pour un hébergeur. Cela me semble particulièrement vrai en matière de terrorisme. Autant, en matière de pédopornographie, il y a peu de place pour l'appréciation subjective, autant il est difficile de discerner si un propos incite à l'engagement terroriste ou fait l'apologie du terrorisme. Il serait périlleux d'en confier l'appréciation à des entreprises privées qui auraient à décider de ce qui est licite ou non en la matière.
En outre, il me semble un peu hasardeux de multiplier les plateformes. Mieux vaudrait que le signalement de ce type de contenu passe par la plateforme existante PHAROS.
Le 2° de l'article vise à mettre en place un blocage administratif difficilement applicable dans les faits. Juste après le blocage judiciaire du site Copwatch, par exemple, on a découvert trente-cinq sites miroirs.
Concernant les sites pédopornographiques, j'estime que l'absence de publication du décret d'application permettant le blocage administratif n'est pas seulement due, comme l'a suggéré le ministre, à des questions d'ordre financier. S'attaquer concrètement à ces contenus présente une vraie difficulté technique. Les sites en question ne sont pas aisément repérables : il s'agit souvent de sites cryptés de partage de contenus, d'échange de fichiers. On ne les trouve pas par une simple recherche sur Google : ils font appel à des constructions techniques très élaborées et très en pointe.
En outre, l'exemple australien a montré que le blocage administratif manque de finesse et de pertinence, ce qui présente des risques : on a constaté que le dispositif atteignait aussi toute une série de sites annexes ou connexes.
L'Assemblée nationale est un autre bon exemple. En effet, par décision du Bureau, il est interdit d'avoir accès à des sites à caractère pornographique à partir du réseau de l'Assemblée – à l'époque, j'avais trouvé étonnant que l'on décide à la place de personnes majeures et vaccinées ce à quoi elles avaient droit quand elles naviguaient sur internet ! Pour avoir testé le dispositif mis en place, j'ai constaté que l'accès à plusieurs sites d'information et sites militants était bloqué.
Au surplus, de tels blocages hâtifs et peu précis pourraient entraver le bon déroulement des enquêtes en cours.