J’ai déjà posé en commission le très grave problème des mamans d’enfants et des femmes enceintes en prison. Actuellement, 3 % environ des personnes incarcérées sont des femmes. Chaque année, il y aurait une cinquantaine d’enfants de moins de dix-huit mois vivant dans les prisons françaises. Actuellement, ils sont vingt-six, et ils étaient cent quarante-six sur les trois dernières années. En Europe, ce sont cinq cents nourrissons qui vivent en détention.
Selon l’article 9 de la Convention internationale des droits de l’enfant des Nations unies, les États doivent veiller à ce que les enfants ne soient pas séparés de leurs parents contre leur gré, et le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, M. Delarue, dont on a souligné tout à l’heure le parfait travail, a demandé que soit engagée une réflexion sur l’aménagement des peines des mères détenues avec des enfants. Il rappelle que la détention des mères avec leurs enfants n’est qu’un palliatif visant à concilier l’inconciliable : la présence d’un enfant près de sa mère et le caractère insupportable de la présence d’un jeune enfant en prison.
Deux problèmes se posent. Le premier est celui de la femme enceinte depuis plus de douze semaines. Est-il normal qu’il y ait une victime de plus, l’enfant à naître ? Chacun sait que la détention aura des conséquences extrêmement importantes sur lui. Le second concerne l’enfant qui naîtra en prison. Nous savons à quel point sont douloureux les quelques mois qu’il passera avec sa mère, dix-huit mois qui peuvent être portés à vingt-quatre.
Je m’en suis entretenu avec le rapporteur, avec la chancellerie, et je vous propose un amendement qui prévoit qu’aucune femme enceinte ne pourra être placée ou maintenue en détention au-delà de la douzième semaine de grossesse. Cependant, cette disposition ne concerne pas les crimes ni les délits contre les enfants, car je ne souhaite pas, alors même qu’une femme aurait commis de tels délits, qu’elle puisse bénéficier de cette mesure.
Ce que je veux, chacun l’a bien compris, c’est protéger l’enfant. Dès lors, je demande que la peine soit suspendue. Je suis ainsi amené à modifier les articles 720-1 et 729-3 du code de procédure pénale. Il faut tout d’abord préciser que le seuil de deux ans prévu au premier alinéa est porté à quatre ans lorsque la suspension s’applique à une mère enceinte depuis plus de douze semaines. Cela s’articule parfaitement avec l’article 720-1, qui dispose qu’une personne condamnée à qui il reste entre deux et quatre ans de prison à effectuer peut voir suspendre sa peine, ou l’exécuter par fractions, pour des motifs graves d’ordre médical, familial, professionnel ou social. Il faut également préciser le premier alinéa de l’article 729-3 relatif à la libération conditionnelle en le complétant ainsi : « ou lorsqu’il s’agit d’une femme enceinte de plus de douze semaines ».
Tout cela concerne peu de cas. Le taux de récidive, pour les femmes, est très faible ; celui des mamans est pratiquement nul. Dès lors, j’appelle la représentation nationale à voter à l’unanimité cette mesure d’humanité.