Intervention de Georges Fenech

Séance en hémicycle du 5 juin 2014 à 21h30
Prévention de la récidive et individualisation des peines — Après l'article 20

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeorges Fenech :

L’arrestation vendredi 30 mai 2014 à Marseille de Mehdi Nemmouche, auteur présumé de la tuerie du musée juif de Bruxelles du 24 mai dernier, nous confronte une nouvelle fois, après l’affaire Mohammed Merah, à un type de terrorisme jusque-là inconnu, mené par ce qu’il est convenu d’appeler des « loups solitaires ».

Dans ces deux affaires, deux individus impliqués au début de leur parcours criminel dans des affaires de droit commun ont découvert en prison l’islam radical. À l’occasion d’une sorte de voyage initiatique, Merah et Nemmouche se sont rendus dans des zones de djihad et ont séjourné au milieu de groupes islamistes. Tous deux sont parvenus à entrer en possession d’un véritable arsenal de guerre et mis, s’agissant de Merah – Nemmouche est encore à cette heure présumé innocent – à exécution un projet meurtrier d’une extrême violence en agissant pour l’essentiel, en l’état de nos informations, en solitaire.

Cette manière d’agir rend difficile la détection de l’acte criminel lui-même alors que, dans le cas d’une action concertée, d’une association de malfaiteurs, les menées terroristes, eu égard notamment aux enseignements tirés des attentats du 11 septembre 2001, les actes préparatoires sont plus aisément repérables, ne serait-ce qu’en raison des communications de toutes sortes entre les différents participants.

En revanche, nous comprenons désormais que ces actes terroristes individuels sont la résultante d’un processus parfaitement visible dont les différentes étapes ont souvent été consignées dans des rapports des services de police ou de gendarmerie ou encore de l’administration pénitentiaire, sans que l’on sache toujours comment exploiter efficacement ces alertes pourtant annonciatrices de tragédies comme celles de Toulouse ou de Bruxelles.

En matière de mise en danger d’autrui, est incriminé le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessure grave par la violation délibérée d’une obligation de prudence ou de sécurité, ceci avant même le commencement d’exécution du délit d’homicide ou de blessure involontaire. À juste titre, en matière de délinquance routière, le législateur bloque le processus qui va conduire de manière possible ou probable à des conséquences graves pour autrui.

Dans ce terrorisme des « loups solitaires », la société tout entière doit faire face à des dérives parfaitement repérables en amont, qui créent un risque, indéterminé dans son contenu mais réel dans son principe, pour l’intégrité et la sécurité de milliers d’innocents. Le présent amendement a donc pour finalité de combler le vide juridique que tout un chacun ressent et de créer un nouveau délit de mise en danger terroriste lorsque différents actes délibérés ont été commis par une personne déjà connue pour crime ou pour délit laissant craindre la commission ultérieure d’actes de terrorisme.

Dans les faits, cette nouvelle incrimination permettrait l’ouverture d’une information judiciaire et l’utilisation de moyens juridiques plus coercitifs tels que les écoutes téléphoniques ou la surveillance, qui permettraient d’intercepter un candidat au terrorisme.

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