Intervention de Bernard Bigot

Réunion du 22 avril 2014 à 15h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Bernard Bigot, administrateur général du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives :

Certaines des études que j'ai mentionnées concernent le nucléaire militaire. Leur programmation a été elle aussi modifiée en conséquence. Mais les différents acteurs s'accordent sur le fait que le report du projet RJH à 2019 n'aura d'impact significatif ni sur le nucléaire civil ni sur le nucléaire militaire, même si l'exploitation du réacteur OSIRIS n'était pas prolongée jusqu'en 2018 comme le demande le CEA – mais pour un autre motif : la nécessité de produire des radionucléides à finalité médicale. En revanche, les conséquences d'un report du projet RJH au-delà de 2019 n'ont pas encore été évaluées. La date de 2019 n'est connue de manière claire et précise – je le rappelle – que depuis la remise du rapport du comité des sages le 21 janvier 2014.

En revanche, le report du projet RJH aura un impact sur la production de radionucléides à finalité médicale. Par irradiation de l'uranium, on produit du molybdène 99, qui se désactive en donnant naissance au technétium 99m, produit à très courte durée de vie utilisé pour le diagnostic de plusieurs cancers et maladies cardiovasculaires ; il existe huit maladies en France pour lesquelles cette technologie et ces éléments ne peuvent être remplacés par d'autres.

Or, au cours de la période de 2016 à 2018, le réacteur canadien NRU – qui fournit actuellement plus de 35 % des radionucléides à finalité médicale à l'échelle mondiale – et le réacteur belge BR2 – qui en fournit une quantité non négligeable – devront subir des travaux d'entretien. De plus, le réacteur de Petten aux Pays-Bas, qui a été arrêté pendant plusieurs années, n'est pas en mesure de reprendre sa production de manière immédiate. À l'inverse, le réacteur OSIRIS, qui a été régulièrement entretenu, reste en bon état de fonctionnement ; si nous l'arrêtons en 2015 comme cela est prévu, nous le ferons sur une base purement volontaire. Le CEA a donc proposé au Gouvernement d'autoriser l'exploitation d'OSIRIS pendant trois années supplémentaires, de façon à permettre à l'ensemble des acteurs concernés de se réorganiser pour répondre aux besoins de la médecine. En revanche, il ne serait guère opportun de prolonger la durée de vie d'OSIRIS au-delà de 2018. En effet, à partir de cette date, en vertu d'un engagement international, les radionucléides à finalité médicale devront être produits exclusivement à partir d'uranium faiblement enrichi – à moins de 20 % – afin de limiter les risques de prolifération. Or le réacteur OSIRIS ne peut fonctionner qu'avec de l'uranium enrichi à plus de 20 %.

J'en viens à l'action « Recherche dans le domaine de la sûreté nucléaire et de la radioprotection » (RSNR) du PIA, qui a été lancée par le Gouvernement à la suite de l'accident de Fukushima. Le financement accordé par le CGI – dotation de 50 millions d'euros au total, assortie d'une exigence de cofinancement de 40 % par projet de la part de leur bénéficiaire – a joué un rôle de levier important pour relancer la R&D sur les problématiques d'accidents graves, qui était en baisse régulière depuis plusieurs années. De nouvelles pistes sont ainsi explorées afin de garantir l'absence de radioactivité à l'extérieur des sites nucléaires en toutes circonstances. Des recherches sont notamment effectuées sur la mitigation des effets de la fusion du coeur et sur les diagnostics utiles à la gestion de crise.

Les résultats de ces études, menées en grande partie dans le cadre de partenariats industriels, notamment avec EDF et AREVA, sont indispensables pour répondre aux enjeux de sûreté liés à l'exploitation des réacteurs dans la durée. Ils permettront notamment de rapprocher le référentiel des réacteurs de deuxième génération de celui des réacteurs de troisième génération en ce qui concerne la prise en compte des accidents graves. Ils seront également utiles au développement de nouveaux modèles de réacteurs.

Je terminerai en évoquant l'action « Recherche en matière de traitement et de stockage des déchets radioactifs », dont l'opérateur est l'ANDRA. Celle-ci a mis en place une collaboration pour le développement d'un procédé d'incinération-vitrification (PIVIC) des déchets contaminés en émetteurs alpha, qui implique AREVA et le CEA. Ce projet a fait l'objet d'un accord en novembre 2013, soit plus de deux ans après la signature de la convention entre l'État et l'ANDRA au titre de l'action précitée. L'accord porte sur une période allant jusqu'à la fin de l'année 2018 et prévoit un financement de 43,85 millions d'euros répartis entre l'ANDRA, AREVA – qui contribueront chacune à hauteur de 19,7 millions, soit 45 % du total – et le CEA – qui apportera 4,4 millions, soit 10 % du total. L'attribution de crédits dans le cadre du PIA a permis de diviser par deux l'apport du CEA, le projet devant initialement être financé à 80 % par AREVA et à 20 % par le CEA.

En outre, un nouvel appel à projets au titre de l'action « Recherche en matière de traitement et de stockage des déchets radioactifs » devrait être lancé au cours du deuxième trimestre de cette année. Le CEA y répondra sans doute, avec ses partenaires.

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