Le projet de COM clarifie pour les trois prochaines années les orientations stratégiques et financières de l'AFD. Il prévoit des autorisations d'engagement à hauteur de 8,5 milliards d'euros par an à terme, contre 7,8 milliards en 2013.
La présentation du projet peut paraître tardive mais elle s'inscrit dans le processus de renouvellement du cadre général de la politique de développement. Ce cadre a d'abord été précisé par le comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) de juillet 2013 puis complété par le projet de loi examiné par le Parlement. En outre, le COM tient compte de la décision de renforcer les fonds propres de l'agence afin de lui permettre de continuer à exercer ses missions.
Le COM repose sur l'idée que l'AFD a pour mission de contribuer à tirer la mondialisation vers le haut. Il s'agit de faire progresser les pays du Sud, à leur rythme, en promouvant une convergence des modèles économiques, sociaux et environnementaux et des stratégies de croissance bénéfiques pour tous.
Cette mission est déclinée pour les trois dimensions du développement, avec de nouveaux indicateurs pour évaluer la contribution à chacune d'entre elles : la lutte contre la pauvreté et la croissance économique ; la cohésion sociale, ainsi que la préservation de l'environnement. Cette dernière préoccupation n'est pas seulement liée à l'organisation en France de la prochaine COP21 mais aussi à la nécessité de s'intéresser au devenir de nos actions.
Dans le même esprit, le COM assigne à l'AFD un objectif structurant et original : 50 % des financements doivent avoir un co-bénéfice climat positif, pour l'ensemble des secteurs d'activité. En outre, le périmètre du second avis développement durable sur les projets, expérimenté depuis 2013, est étendu.
La stratégie de l'AFD s'adapte au niveau de développement de chaque pays partenaire et tient compte des priorités géographiques de la France.
Le COM consacre ainsi la priorité donnée au continent africain. En 2013, 46 % des financements étaient destinés à l'Afrique subsaharienne, et plus de la moitié à l'Afrique du nord et sud du Sahara. Lors du sommet de l'Élysée pour la paix et la sécurité en Afrique, l'engagement a été pris d'apporter, via l'AFD, vingt milliards d'euros sur cinq ans au continent africain.
Priorité est également donnée à l'Afrique dans l'utilisation de l'enveloppe de dons qui profite aux pays les plus pauvres – les 16 pays pauvres prioritaires dont la liste a été arrêtée par le CICID – et les pays en situation de crise ou de fragilité. Les deux tiers de l'enveloppe sont attribués aux pays pauvres prioritaires et 15 %, aux pays en crise.
85 % de l'effort budgétaire de l'Etat – subventions et bonifications de prêt – bénéficie aux pays africains. Tous les domaines du développement sont concernés – l'éducation, la formation professionnelle, l'insertion des jeunes, le développement urbain, les infrastructures, l'accès à l'énergie et à l'eau, le développement du secteur privé – et l'impact sur le climat est toujours pris en compte.
Dans les pays d'Asie et d'Amérique latine, le COM assigne l'objectif de soutenir la croissance verte. Dans ces régions dans lesquelles les niveaux de vie sont plus élevés et les rythmes de croissance prometteurs, 70 % des financements doivent avoir un co-bénéfice climat. Les financements sollicitent rarement des euros du contribuable. Il s'agit principalement de prêts pour lesquels les bonifications sont faibles ou nulles. L'agence cherche à obtenir des résultats importants pour l'agenda de la France sans mettre à contribution le budget de l'État.
L'outre-mer représente une part importante et historique de l'activité de l'AFD. L'agence y a consacré 1,5 milliard d'euros de financements en 2013. Cette missionde développement durable s'exerce au travers du financement des investissements des acteurs publics, d'une part, et du soutien au secteur privé, d'autre part. Les financements de l'agence ont pour but de développer les filières économiques et l'emploi et de favoriser la cohésion sociale. Elle veille également à l'insertion des collectivités d'Outremer dans leur environnement régional dans lequel ils sont les têtes de pont de l'économie française.
En matière financière, le COM repose sur une croissance raisonnée du volume d'activité, avec un niveau d'engagement qui passe de 8 à 8,5 milliards d'euros sur trois ans, sans coût supplémentaire pour l'État. La filiale PROPARCO apporte, quant à elle, un milliard d'euros de financements.
L'agence propose des outils financiers variés et adaptés aux besoins des pays et des partenaires. Un sous-objectif relatif à l'augmentation des financements non souverains est ainsi fixé. Ces financements s'adressent aux entreprises que les banques classiques refusent de financer seules, mais aussi aux collectivités locales et à leurs entreprises publiques, qui peinent à trouver des bailleurs de fonds, ou encore aux ONG et aux fondations. Ils comblent les trous dans le financement des projets et jouent un rôle de démonstration à l'égard des autres bailleurs.
Le COM réaffirme que le métier de l'AFD ne se résume pas à apporter des financements. Il souligne l'importance des missions d'expertise et de soutien au renforcement des capacités et de production de connaissance. L'AFD est une banque et une agence de développement ; elle n'est pas une banque comme les autres.
L'ouverture et le partenariat caractérisent la démarche de l'AFD. Chacun le sait, l'aide au développement ne suffit pas à couvrir les besoins. Il faut donc trouver des solutions innovantes et attirer des investisseurs pour les projets, grands ou petits. L'agence travaille ainsi avec les petites et grandes entreprises intéressées par l'économie sociale et solidaire. Elle collabore également avec d'autres bailleurs. À ce titre, le COM lui impose d'articuler ses projets avec les financements de l'Union européenne afin d'assurer la cohérence de la politique européenne d'aide au développement.
L'AFD a également pour mission de promouvoir l'influence française. Elle est, par construction, un vecteur d'influence de la France dans les pays dans lesquels elle est présente. Ces pays sont très demandeurs d'expertise et de mise en relation avec des alter ego français – élus locaux ou entreprises. La demande de France est significative notamment dans les zones où les pays cherchent à élargir leurs partenaires et où il existe une influence régionale dominante.
Pour répondre à cet objectif, l'agence développe sa connaissance des savoir-faire en France, dans les secteurs dans lesquels elle opère, notamment l'eau, l'assainissement ou encore à la ville intelligente, afin d'aider les entreprises françaises à se positionner sur les marchés. Un indicateur dans le COM prévoit ainsi de mesurer la participation des entreprises aux appels d'offres financés par l'AFD.
Enfin, l'AFD poursuit un objectif plus large tenant à la diffusion des modèles de gestion, des politiques publiques et des modèles de protection sociale de notre pays. La diplomatie écologique est également un élément structurant du COM. À ce titre, l'agence participe à la préparation de la COP21 en faisant la démonstration de la capacité à financer des projets durables.
Le COM fixe à l'agence des objectifs ambitieux en matière de redevabilité et de transparence. Celle-ci peut s'appuyer sur plusieurs éléments : un engagement volontariste en matière de responsabilité sociétale des organismes, des outils de pilotage renforcés au sein du conseil d'administration, la transparence des informations relatives aux 16 pays pauvres prioritaires ainsi qu'une nouvelle politique d'évaluation, approuvée par le conseil d'administration à l'automne dernier.
S'agissant des moyens, le COM tient compte des spécificités de l'AFD, qui est à la fois établissement public et commercial et établissement bancaire. Son budget et ses charges de fonctionnement sont entièrement couverts par ses ressources. L'établissement est contrôlé par l'Autorité de contrôle prudentiel et bientôt par la BCE – lorsque le bilan dépassera 30 milliards d'euros.
Pour la première fois, le COM détermine un objectif de croissance du résultat net, afin de permettre, pour l'essentiel, de renforcer les fonds propres. Le COM fixe également un ratio entre recettes et dépenses qui suppose un effort de maîtrise des charges important. Cet effort se traduit dès cette année par une croissance des dépenses limitée à 1,5 % et une réduction des charges externes de 1,5 %. Enfin, le COM prend acte de la décision de renforcement des fonds propres de l'AFD.
Pour ce faire, le statut juridique de la dette de l'agence à l'égard de l'État, qui est l'une de sources de la bonification des prêts, va être transformé. Cette modification, qui permet de respecter les ratios exigés par Bâle III quant à l'équilibre entre les fonds propres, ne coûte pas un centime à l'État. Ce sont ainsi 840 millions d'euros qui viendront alimenter les fonds propres, en trois tranches entre 2015 et 2017, auxquels vient s'ajouter l'engagement pris par l'État dans le COM de mettre en réserve le résultat à hauteur de 80 %. Pour cette année, la part affectée sera de 60 % du résultat de 2013 et de 80 % pour les trois prochaines années.
Grâce à ce renfort, l'agence peut recommencer à travailler dans des pays historiques pour elle, comme le Maroc, la Tunisie, le Vietnam et l'Afrique du Sud.
Cet effort s'imposait car Bâle III rehausse les exigences de structuration en matière de fonds propres. Mais il convenait surtout de rompre avec la pratique de ces dix dernières années, à rebours du modèle historique dans lequel l'État accompagnait la croissance de l'AFD en laissant le résultat en réserve pratique qui a consisté à distribuer à l'État sur les 10 dernières années un dividende qui, cumulé, représente près d'1,4 milliard d'euros qui font aujourd'hui cruellement défaut à l'établissement. Le contexte des finances publiques est difficile pour demander à l'État de renoncer à cette ressource mais c'est absolument nécessaire pour permettre à l'agence de continuer à exercer sa mission.
Le résultat de l'agence sera donc fléché vers les fonds propres. Je rêverais de pouvoir consacrer une partie de ce résultat à l'augmentation de l'enveloppe de dons, mais la mise en conformité avec Bâle III nous l'interdit.
Les crédits d'intervention – les dons, les bonifications – ne figurent pas dans le COM pour la simple raison que nous ne disposons pas du triennum budgétaire, contrairement au COM précédent. Nous nous fondons néanmoins sur l'hypothèse d'une stabilité des crédits.