La méthode du CCE n'a d'impact qu'indirect sur le montant du coût d'exploitation. Nous l'avions retenu dans le précédent rapport, parce qu'elle permet de prendre en compte l'investissement initial, auquel il faut ajouter des dépenses de maintenance.
Au reste, diverses méthodes ont été appliquées. Sur le plan comptable, on a calculé l'amortissement d'abord sur trente ans, puis, depuis une dizaine d'années, sur quarante ans. La méthode Champsaur concentre la somme restant à amortir sur le reste de la durée de vie des réacteurs. La méthode du CCE est la plus pertinente pour comparer 2010 et 2013. Les ajustements mineurs intervenus depuis le dernier rapport sont liés à l'actualisation du taux d'intérêt.
Plusieurs d'entre vous m'ont interrogé sur la durée de vie des centrales. Au-delà des décisions économiques, la loi donne mandat à l'ASN d'autoriser ou d'interdire la prolongation, compte tenu de ses exigences en matière de sûreté. L'Agence apporte dans ce domaine une garantie technique.
Si l'on ne prolonge pas la durée de vie des centrales, EDF ne réalisera pas tous les investissements de maintenance prévus, qui permettent non seulement d'entretenir les réacteurs mais aussi d'intégrer des gros équipements qui fonctionneront encore vingt à vingt-cinq ans. Ce choix, qui réduirait son budget d'investissement, entraînerait aussi des arrêts plus fréquents dans certaines centrales. Le raisonnement selon lequel prolonger la durée de vie d'une voiture coûte moins cher qu'en acheter une neuve, vaut aussi pour un réacteur. Les investissements de maintenance seront vraisemblablement rentables.
Sachant que les États-Unis ont allongé la durée de vie des deux tiers des réacteurs jusqu'à soixante ans, EDF songe sûrement pouvoir le faire en France, puisque les deux pays ont les mêmes équipements. En revanche, notre système d'autorisation est différent. Les Américains établissent une autorisation initiale pour une durée fixe, alors que la loi française oblige l'ASN à se prononcer tous les dix ans sur la prolongation.
Pour la plupart des risques majeurs, l'État devient de fait assureur en dernier recours. Si une catastrophe chimique se produit dans la vallée du Rhône – supposons qu'une série d'explosions graves se produise dans une usine proche de Lyon, alors que le vent souffle vers l'agglomération –, je ne suis pas sûr que les assurances couvrent la totalité du risque. Celui-ci, sur le plan comptable, devrait figurer au moins au hors-bilan de l'État, mais ce n'est le cas pour aucun risque énergétique. Dans le même ordre d'idée, si un barrage rompait sur la Durance, on peut penser qu'EDF ne serait pas capable de couvrir les dégâts et que l'État prendrait la réparation en charge.
La comptabilité analytique permet d'isoler la rentabilité d'une centrale, mais une partie des frais – direction centrale d'exploitation, équipes centrales – sont communs à toutes les unités. Si un groupe n'en exploitait qu'une seule, celle-ci aurait un coût de revient très élevé, ne serait-ce que parce qu'il faudrait constituer une équipe spécifique.
La durée de vie du dispositif actuel joue un rôle majeur dans la rentabilité, mais la Cour n'est pas compétente sur des questions de sûreté, qui relèvent de l'ASN. Nous pouvons seulement constater que, dans d'autres pays, les mêmes centrales sont calées pour vivre soixante ans, et que les exigences de l'ASN vont croissant.
Madame Battistel, je n'ai pas les chiffres que vous avez cités, concernant l'impact du prolongement du parc sur le prix de l'électricité ou la fiscalité d'EDF. Reste que, si l'on reporte à plus tard les dépenses futures du groupe, on diminue ses provisions actuelles, donc ses reprises sur provisions annuelles. De ce fait, ses bénéfices vont augmenter, ce qui lui permettra d'acquitter des impôts supplémentaires.