En effet, d'autant que certaines fédérations avaient déjà avancé dans cette réflexion. Par exemple, la Fédération nationale des associations gestionnaires au service des personnes handicapées et fragiles (FEGAPEI) disposait, dès 2009, d'un système d'information performant mais qui n'était utilisé que par une partie des adhérents. Voyant qu'une agence nationale, appuyée par la CNSA, les agences régionales de santé (ARS) et les conseils généraux, intervenait pour rendre ces instruments plus transparents et plus ouverts, les grandes fédérations ont très vite suivi le mouvement. C'est d'ailleurs leur intérêt de disposer d'une vision panoramique de l'activité des établissements de leur réseau. Elles ont contribué à la propagation et à la diffusion du tableau de bord ; à ma connaissance, aucune d'entre elles ne s'est opposée au processus.
Notre but est le même que celui de l'État : répartir les moyens de façon équitable. Mais pour cela, il faut se donner du temps, respecter les acteurs, leur culture, leur histoire. Tous ne s'entendent pas entre eux ; certains ont une sensibilité religieuse, d'autres sont laïcs. Dans ce climat très sensible, il était nécessaire d'établir un dialogue et d'associer les personnes concernées à nos travaux. En adoptant une attitude trop volontariste, en voulant faire trop vite, on se serait mis tout le monde à dos, si bien que le projet de tableau de bord, initialement proposé par M. Hervé Droal à la CNSA, aurait probablement connu l'échec. Notre rôle a donc été de créer du consensus. Or, si les notions de comparaison et de performance étaient difficilement acceptables, l'idée d'équité dans la répartition des enveloppes, elle, pouvait faire consensus.
Dans le secteur hospitalier, nous avons élaboré un outil, « Hospi-diag », désormais très utilisé, et qui répondait à des besoins similaires : c'est un instrument de dialogue de gestion partagé par l'ensemble des acteurs et destiné à améliorer la transparence et l'équité. De telles démarches paraissent indispensables si nous voulons que soit mieux appréciée l'action d'institutions qui consomment d'importantes ressources publiques.
Outre la recherche d'une meilleure connaissance du secteur et l'aide à la structuration des systèmes d'information, nos travaux ont concerné l'approche territoriale. La loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST), mais aussi la politique actuelle, conduisent à apprécier les problématiques de prise en charge des personnes non pas par établissement, mais par parcours de soins. Un patient peut, en effet, fréquenter la médecine de ville puis alterner entre un établissement hospitalier et un établissement médico-social ; il est souvent amené à croiser différents producteurs de services de santé, de soins et d'hébergement.
C'est pourquoi notre réflexion s'est articulée autour de trois axes : les territoires, les établissements, les personnes. Comment mieux prendre en compte les parcours sur un territoire, en s'appuyant sur les schémas régionaux d'organisation des soins (SROS) ? Comment promouvoir la mutualisation entre établissements et l'externalisation des services, notamment par le biais du contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (CPOM) ? S'agissant des personnes, on parle toujours de leur parcours, mais on ne leur demande jamais leur avis. Il nous paraît donc nécessaire de travailler davantage avec les associations de patients. Par exemple, il ne sert à rien d'organiser une consultation avancée pluridisciplinaire dans une ville si les gens ont l'habitude de faire leur marché ailleurs.