Intervention de Christian Bataille

Réunion du 5 juin 2014 à 10h00
Commission d'enquête relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire, à la durée d'exploitation des réacteurs et à divers aspects économiques et financiers de la production et de la commercialisation de l'électricité nucléaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Bataille :

Il me semble qu'elle est plus proche de cinquante ans ; mais on n'est pas à quelques années près. En tout cas, cet âge dépasse largement les quarante ans.

Ce n'est d'ailleurs pas au Parlement, mais à l'ASN, dont on connaît l'indépendance, qu'il appartient de se prononcer sur la durée de vie des centrales. La fermeture de Fessenheim serait une perte, mais je m'inclinerais bien entendu si l'ASN jugeait qu'elle s'impose – ce qui, pour l'instant, ne semble pas être la perspective.

Les autres recommandations me semblent indiscutables. Dans le cadre de la loi de 2006, j'avais moi-même préconisé, par exemple, la constitution de fonds dédiés, placés sous la responsabilité de la Caisse des dépôts.

Pour le reste, il est bien légitime que le rapport reflète les convictions et les engagements du rapporteur ; mais les membres de notre commission d'enquête ne sont pas obligés de le suivre.

On peut d'ores et déjà parier que ce rapport sera diversement interprété dans la presse. Le journal Le Monde, devenu le porte-parole des anti-nucléaires, ne manquera pas d'en exciper pour publier une diatribe contre cette source d'énergie. J'avais personnellement rédigé, sur le gaz de schiste, un rapport dont un journaliste avait tiré, sans l'avoir lu, un article caricatural et à charge… Bref, même si le jugement peut être plus nuancé dans d'autres journaux, comme Les Échos, on sait d'avance que, malgré son caractère équilibré, le rapport générera une litanie de discours hostiles au nucléaire.

D'autre part, certains aspects y sont un peu passés sous silence : la question des externalités, par exemple, devrait aussi être posée pour d'autres sources d'énergie, responsables d'émissions de gaz à effet de serre, de rejets dans l'eau et dans l'air, de la dégradation de paysages, d'occupation des sols, pour ne pas parler des conditions de travail dans les mines de charbon, en Chine ou en Turquie. La production d'énergie nucléaire, c'est vrai, est exposée à des accidents de la nature, on l'a vu à Fukushima, mais elle n'est pas plus risquée que d'autres. N'oublions pas non plus, car on ne le répète pas assez, que le nucléaire n'émet pas de CO2 ; grâce à lui, la France est le pays d'Europe, après la Norvège, qui émet le moins de gaz à effet de serre.

Autre question : quand se penchera-t-on sur le renouvellement des centrales ? Entre la réflexion, l'élaboration et la construction, le processus prend plusieurs décennies : il faudrait y réfléchir assez tôt pour permettre à la nouvelle génération de centrales de prendre progressivement le relais – puisqu'il faudra bien fermer un jour celles qui fonctionnent aujourd'hui : après tout, nous ne sommes en désaccord que sur les dates…

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